La vision contradictoire de Nadine M. Khalife et Vilévo DEVO, deux grandes figures de la question monétaire dans la sous-région.
Le mythe de la garantie française de la convertibilité du franc CFA, par Nadine M. Khalife
Samba Sylla ignoré totalement la géopolitique monétaire internationale où les spéculateurs camarades interviennent sur les marchés monétaires pour faire chuter les cours de change de diverses monnaies nationales en spéculent sur leur valeur future à la baisse. C’est ainsi que dans les années 1980, avant que la Lire italienne ne soit intégrée dans le serpent monétaire européen pour la protéger, cette lire avait perdu 20% de sa valeur de change suite à l’assaut du cambuse George Soros. Il en fut de même pour la Livre Sterling quelques mois plus tard.
Or, la seule garantie de la France, dont le PIB représente 26 fois le PIB de toute l’UEMOA, suffit à dissuader tout spéculateur cambiaire de jouer contre le FCFA.
par contre, le Naïra, dont le PIB du Nigeria représente plus de 10 fois le PIB de l’UEMOA, n’arrive pas à résister aux assauts des spéculateurs qui précipitent sa baisse au moindre signe d’affaiblissement de l’économie nigériane. C’est encore pire pour le Ghana dont le CEDI a été devalué beaucoup plus souvent que le Naïra !
Quant aux avantages de la Banque de France de recueillir les dépôts de la BCEAO, il faut savoir que ces dépôts ne représentent que 2% des réserves de change de la France.
Par contre, malgré l’ancienne règle de déposer à la BdF d’abord 50% puis 20% des réserves de la BCEAO à la BdF, la BCEAO y déposait plus de 90% parce que la BdF les rémunérait o,75% au-dessus du taux international. Et cela ne relevait d’aucune obligation contractuelle ! Tout simplement, la France cherche à sauvegarder ses liens avec la zone FCFA et cela fournit à la BCEAO un supplément de recettes d’env. 80 milliards Fcfa par an, de quoi lui permettre de financer les investissements de l’UEMOA dans les infrastructures des pays membres.
Les anti-FCFA ignorent ces avantages uniques du Fcfa qui protègent en outre le pouvoir d’achat des populations modestes contrairement aux populations des pays non Fcfa dont les épargnants se protègent contre l’érosion de leur monnaie nationale en la fuyant pour racheter des Fcfa qui garnissant leurs coffres-forts !
Ce sont des gens passionnels qui sont aveuglés par leur passion anti-française sans véritable raison autre que leur formatage par la propagande anti-française des 200 réseaux russes de Poutine qui sillonnent l’Afrique subsaharienne depuis 2014 qu’il a envahi militairement la Crimée…
La garantie de convertibilité illimitée des francs CFA, par Vilévo DEVO
« Le mythe de la garantie française de la convertibilité du franc CFA. », tel est le titre d’un article, daté du 08 novembre 2023, publié en ligne par « Magazinedelafrique », qui massacre le sujet sur un ton polémique, plus qu’il ne dialogue avec. La garantie de convertibilité du franc CFA serait ni plus ni moins un produit d’ingérence indue de la France (sic).
Au demeurant, la thématique est traitée à la marge et noyée dans énormément d’affirmations gratuites et fausses dès les tout-premiers paragraphes. Le Professeur Joseph Tchuindjang POUEMI, premier et rare critique sérieux du franc CFA, est référencé pour 2000 alors qu’il est mort en décembre 1984. Le compte d’opérations d’il y a un demi-siècle évoqué par Mamadou Diarra en 1972, des temps immémoriaux de l’existence d’offices des changes dans la sous-région, est sorti de son contexte pour alimenter des critiques, relevant du reste de méjugements, du système monétaire des francs CFA. Il est écrit que la garantie serait purement nominale et superflue : ce qui bien entendu transgresse grandement la réalité d’une garantie monétaire complexe, outil à la fois financier pour son volet classique et non financier pour son apport au vivre ensemble monétaire et solidaire, à la fois visible et invisible par ses processus etc.
Il faut remarquer que les faiblesses du franc CFA que soulignait le Professeur POUEMI et celles relevées par Mamadou DIARRA, plus spécifiquement sur le volet des changes, remontent mine de rien à un demi-siècle. À leur époque, Pouemi et Diarra ont eu à peine dix années de recul pour juger du fonctionnement de l’Union monétaire ouest africaine (Umoa) par exemple et bien moins, de celui de la zone monétaire d’Afrique centrale où les États-parties étaient en coopération monétaire et pas encore en union monétaire ; les pays d’Afrique centrale hésitaient en ces temps à s’engager dans une Union contrairement aux ouest-africains. C’était surtout une grosse période de contrôle des changes jusqu’en 1968 en France, pays-garant de la convertibilité des francs CFA, une période où la gouvernance monétaire était aux mains des français, une période où les directives de la monnaie et du crédit n’étaient pas encore africanisées et enfin, une période où les économies concernées étaient France-extraverties. Les _choses_ ont quand-même bien changé au fil des décennies, ne serait-ce qu’au titre de l’africanisation du personnel, qui n’a tout de même pas promu depuis cinquante ans que des abrutis à la place des français, l’orientation géographique diversifiée des échanges de biens et services avec l’étranger et nombre de réformes importantes invisibles aux non-initiés et aux anti franc CFA primaires.
Mais au fond, supprimer pour supprimer, en quoi cette garantie est-elle si gênante au point de se précipiter aveuglement pour la dénoncer, y compris essentiellement avec de faux arguments, de mauvaises statistiques et des références inappropriées, alors qu’elle participe grandement à la stabilité des pouvoirs d’achat dans les pays émetteurs de francs CFA, minés par la corruption et la gabegie, assure une opérationnalité apaisée de la mutualisation et de la gestion des réserves de change_ au cœur du dispositif de vivre ensemble monétaire et solidaire des pays émetteurs de Franc CFA, regroupés en deux unions monétaires, et surtout, participe à la protection un tant soit peu du revenu des populations contre l’érosion monétaire ? Avec autant d’atouts, comment peut-on affirmer que la garantie est purement nominale et superflue sans faire preuve de légèreté intellectuelle ?
Non, la garantie française de convertibilité du franc CFA n’est nullement un mythe mais un instrument monétaire bien pensé, retravaillé au fil des décennies pour plus de pertinence monétaire et financière, doublé d’une réalité de terrain bien vivace et encore opportune etc.
La garantie monétaire en question ne peut être une préoccupation là où la corruption et la mal gouvernance détruisent les fondements-mêmes des économies des pays émetteurs de franc CFA. Elle ne dit pas son nom et n’affiche pas ses vertus contre le délabrement monétaire assuré des populations, mais elle est une évidence opportune pour le vivre ensemble monétaire et solidaire unique au monde du modèle franc CFA. À cet égard, avant que sa formule ne disparaisse de manière cavalière, il faudrait s’assurer de pratiques parmi les meilleures et d’outils appropriés pour d’une part protéger le pouvoir d’achat des populations dans un environnement de gabegie et d’autre part, éloigner les États émetteurs de francs CFA du spectre de l’implosion de la règle sacro-sainte de solidarité que résume la mutualisation intégrale des réserves de change en Afrique occidentale et en Afrique centrale …
L’auteur a encore beaucoup à apprendre du système monétaire des francs CFA et de l’ensemble de son corpus.
” TAMPA EXPRESS » numéro 0051 du 07 février 2024 ”