Ce qui est rare et prend de la valeur ; ce qui prend de la valeur est ce que tout agent économique rationnel recherche. Qui ne voudrait pas du Franc Suisse par exemple dans son portefeuille, voire du Franc CFA en lieu et place du Naira et du Cedi ?
La rareté d’une monnaie, entendue dans le sens d’une offre de monnaie rare alors que l’économie est en demande, a logiquement un impact nocif sur la production.
Dans le cas du Franc CFA de l’Union monétaire ouest africaine (Umoa, 1962), le stock de monnaie (Masse monétaire ou moyen de paiement ou Mo), dont a besoin l’économie d’un pays membre donné au cours d’une année, est estimé proportionnellement au Produit intérieur brut (PIB) dudit pays ; ce Mo, ou moyens de paiement dont l’économie a besoin, est la somme des billets de banque détenus par les particuliers et entreprises et des dépôts en banque de ces derniers.
La composante billets de banque de Mo provient de la Bceao et de la Bceao seule qui l’émet et se donne les moyens de la réguler via les refinancements en faveur des banques et le financement (direct ou indirect) des trésors nationaux ; il se raconte que le Trésor français empêche la Bceao de mettre en circulation la quantité de billets dont ont besoin les économies des pays émetteurs en raison de clause restrictives issues d’accords de coopération monétaire avec la France. Une telle contrevérité alimente tous les fantasmes sur les raisons qui entravent le développement économique des pays émetteurs de Francs CFA, au point de banaliser le phénomène assassin de la corruption des élites et des Chefs d’État et celui de la mal gouvernance.
Il y a aussi la composante dépôts en banque des particuliers et entreprises qui, ajoutée aux billets de banque en circulation, a pour contrepartie les crédits à l’économie encore appelés crédits aux particuliers et entreprises. Les crédits à l’économie sont réputés, à tort, étouffés par la Bceao à qui est même reprochée son appétence pour une offre de monnaie prudente et en tout état de cause une offre insuffisante de monnaie.
En français facile, il convient de relever que l’offre de monnaie d’une Banque centrale seule ne peut suffisamment booster et de manière saine les crédits à l’économie ; il faut une offre conséquente et complémentaire des banques primaires. À ce propos, la Bceao met les banques commerciales au défi depuis trente ans, depuis la libéralisation des conditions de banque, la suppression des politiques sectorielles du crédit, la suppression des marges bancaires imposées etc. de lui apporter la preuve qu’elles sont entravées dans l’exercice de leurs activités de crédit et de collecte de ressources ; elles en sont incapables.
Il n’en reste pas moins que le financement bancaire de l’économie, ou crédit à l’économie, est incontestablement insuffisant dans l’espace Umoa ; c’est même un marqueur négatif de la Zone Franc CFA en général. Pour autant, est-il logique d’en imputer la responsabilité à la Bceao et plus grave comme accusation, en faire un point de faiblesse du système Franc CFA ? Bien sûr que non !
Pour partiellement dédouaner la Bceao et sa politique monétaire, du fait que les financements bancaires de l’économie peinent à éclore, il convient de rappeler que les conditions du crédit bancaire sont libéralisées depuis une trentaine d’années dans l’Umoa ; les établissements de crédit sont généralement en surliquidité dont ils abusent en placements en titres d’État, grassement rémunérés rendant les activités de crédit aux particuliers et entreprises moins intéressantes etc. ; s’y ajoute que la masse monétaire, dont les crédits à l’économie sont la contrepartie, n’est nullement bridée dans l’Umoa par aucune réglementation empêchant les banques de créer de la monnaie conformément à leur vocation et de distribuer du crédit …
En définitive, ce qui bride le financement bancaire de l’économie est à rechercher prioritairement du côté des politiques économiques, faiblement pertinentes et peu vertueuses, et du côté des finances publiques en déliquescence sinon en ruine dans certains États-membres de l’Umoa. Si l’économie va, pourquoi les banques ne la financeraient pas ; la preuve en est que là où ça va malgré tout, macro-économiquement s’entend, comme en Côte d’Ivoire et au Sénégal, les pays concernés sont les premiers de la classe Umoa en taux de financement bancaire de l’économie. En Côte d’Ivoire, pour ne citer que ce pays, les financements publics sont énormes, diversifiés et en soutien aux activités et secteurs moteurs de croissance de l’économie nationale.
Les États membres de l’Umoa ont une lourde responsabilité dans la frilosité du financement bancaire de l’économie et non la Bceao. En son temps, pour y apporter des solutions idoines, le Président Abdoulaye Wade du Sénégal n’a pas hésité à recommander des états généraux du crédit bancaire : une géniale idée toujours d’actualité.
Vilévo DEVO
« TAMPA EXPRESS » numéro 0058 du 29 mai 2024
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