Une performance fiscale au Togo sans augmenter la taxe pour ne plus faire pression sur les contribuables est un bluff. Et pourtant, c’est le discours qui a court lors du vote de la Loi des finances (LDF), exercice 2025, votée par l’Assemblée nationale (AN) le 27 décembre. Le nouveau budget, approuvé, s’équilibre en ressources et en charges à 2.394.165.472.000 FCFA, avec une hausse de 6,5% par rapport à 2024.
Le 22 janvier 2025, l’Office Togolais des Recettes (OTR) avec son commandant en chef Dr Philippe Kokou Tchodié, Commissaire Général par intérim de l’OTR, depuis 2019, a convié son public sur le site de la Foire Internationale Togo 2000 pour soi-disant vulgariser ce qu’ils appellent les « innovations », entre autres, les grandes masses du budget 2025, les mesures fiscales et douanières contenues dans la loi de finances 2025. Le ministre Essowè Georges Barcola de l’Économie et des Finances avait délégué la Direction Générale du Budget pour le représenter à cette rencontre.
C’est au cours de cet exercice que le peuple togolais a appris que la contribution des recettes fiscales au budget de l’Etat sera de 1208,3 milliards FCFA, soit une hausse de 8% par rapport à celui de l’année écoulée (loi de finances rectificative 2024).
Et comme ce genre de séances ne sont destinées que pour des adeptes, un public qui pense plus à sa panse qu’à l’intérêt de la Nation, c’est le moment d’exhibition pour les courtisans, pendant que le vivre ensemble est en péril. Tout se limite aux annonces des grandes lignes que tout le monde connaissait, puis louanges et cultes de personnalité des fonctionnaires qui font la misère du peuple. Mais, en allant dans les détails, l’on découvre les mammouths qui constituent de véritables jackpots. Ce que Stephen King désigne par « La vérité est dans les détails », en d’autres termes cette idiotie, « Le diable est dans les détails » qui fait allusion à un élément mystérieux caché dans les détails. En effet, le Code général des impôts (CGI) 2025, introduit dans l’article 171 (nouveau) une nouvelle infusion dénommée Taxe sur les Entreprises de Télécommunications et des Technologies de l’Information et de la Communication (TETTIC) : « Il est institué, au profit du budget de l’Etat, une taxe dénommée Taxe sur les Entreprises de Télécommunications et des Technologies de l’Information et de la Communication ».
Cette taxe est due par toute entreprise titulaire d’une licence pour l’établissement et l’exploitation du réseau des télécommunications ouvert au public. Elle est assise sur le chiffre d’affaires annuel hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de toute entreprise titulaire d’une licence pour l’établissement et l’exploitation du réseau des télécommunications ouvert au public. La taxe d’un taux de 5% est admise seulement « en déduction de la base taxable à l’impôt sur le revenu » comme le calcul des déductibilités de l’IRPP.
Et l’Art 171 (quinquies) du CGI : « Un arrêté du ministre chargé des finances fixe la répartition des produits de la TETIC. » C’est-à- dire que pour l’instant, la destination de ces fonds est inconnue du pauvre contribuable.
Il s’agit d’un véritable jackpot que TOGOCOM-TOGOCEL (YAS Togo), MOOV AFRICA, TEOLIS, CAFE INFORMATIQUE Et GVA vont désormais devoir verser à l’OTR chaque 15 du mois en dehors de la TVA normal de 18%. Selon les données de l’Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) en 2024, le secteur d’activité a généré un chiffre d’affaires de 262,27 milliards FCFA. Ce qui aurait pu produire une TETIC d’un peu plus de 13 milliards FCFA pour un montant de TVA effectivement versé de 47,2 Francs CFA pour le seul secteur.
Sachant que la TETIC est une nouvelle taxe introduite cette année 2025 et que le secteur est en pleine croissance moyenne de 5%, les contributions (toute catégorie) des seules sociétés de téléphonie peuvent atteindre entre 10 et 15% des recettes fiscales.
Evolutions du marché des communications électroniques
La TETIC étant introduite sans discussion préalable avec les acteurs donc non budgétisés. Alors à défaut de prendre en charge les taxes au détriment de leur posture capitaliste, ce qui est inadmissible pour les actionnaires, soit les sociétés de téléphonies ponctionnent les abonnés, décident de réviser leur tarification à la hausse. Ce qui également peut avoir des impacts inverses non négligeables sur le plan social.
C’est aussi dans le même sillage que l’article 99 du CGI relatives aux retenues à la source est désormais élargi à tout distributeur ou point de vente Mobile Money dans la LDF 2025. Un élargissement de l’assiette qui prend à contre-pied TOGOCOM qui, visiblement ne serait pas encore en accord avec la loi. Les taux se présentent comme suit : 3% si le bénéficiaire possède une attestation de régularité fiscale donc une entreprise formellement constituée, 5% s’il dispose d’un Numéro d’identification fiscal (NIF) et 20 % pour les autres. Ce qui dit implicitement que l’informel ou le pauvre citoyen du bord de la route ou du quartier dans son débrouillardise doit payer plus.
Bref, il s’agit des charges et taxes indirectes pour les sociétés et dont le principal à les prendre en charge est le consommateur final donc la population. On ne le dira jamais assez, la pression fiscale sur la population continue de plus belle et détruit les couches sociales les plus défavorisées. Mais l’Etat togolais ne fait pas suffisamment d’effort pour les accompagner dans leur galère économique.
Selon des indiscrétions, venant des sociétés de téléphonie, l’Office dirigé par Philippe Tchodié fait tellement de pression, depuis janvier pour des versements anticipés des nouvelles taxes car, les caisses du Trésor public sont vides.
Pourtant, le pays dispose des niches fiscales sous la forme de paradis fiscal aux étrangers. Il faut absolument les supprimer pour accroître les recettes publiques. Par exemple ; les exonérations de 18% de la TVA sur les engins neufs. Bien qu’étant une mesure incitative pour favoriser le renouvellement de la flotte terrestre, elle ne concerne que les plus nantis qui ont les moyens pour participer à la solidarité. La suppression de cette exonération ne sera que justice faite aux modestes Togolais qui n’auront jamais les moyens pour s’offrir une voiture neuve. Aussi, les exonérations qui sont accordées aux batteries des motos électriques apparaissent comme un trafic illicite car, au lieu d’activer les mécanismes de dynamo pour la recharge des batteries, les asiatiques importateurs déconnectent le système pour pouvoir importer suffisamment les accumulateurs bon marché pour bénéficier des exos. En plus, ces batteries de moindres qualités doivent être rechargées sous tension électrique après environ 30 km de courses. Les astreindre au rechargement automatique par dynamo peut faire économiser de l’électricité au bénéfice des populations et l’économie.
Enfin, le Togo doit être indépendant de la gestion de son commerce extérieur en nationalisant les opération Guichet Unique par l’OTR. Canaliser toutes les recettes de l’Etat (Port, Impôt, Douane, Police, CNCT, DAM…) dans un guichet unique. Les recettes du Travail extra légal (TEL) des douanes et les amandes et pénalités du fisc qui fondent la richesse induite des agents doivent intégrer également la caisse commune. Il est aussi impérieux de couper le trop de contacts entre agents de l’OTR et les importateurs en rendant effectif la dématérialisation des opérations de douanes et transit afin de supprimer les dessous de table qui les engraissent.
En résumé, le Pays est pauvre mais les membres des réseaux qui l’animent sont immensément riches. Le Togo est résolument à la merci d’une corruption endémique, et tenant compte de l’extravagance de certains commis de l’Etat, pratiquement aucun chiffre officiel ne correspondrait à la réalité. Ce qui se rapporte à la critique de cette célèbre citation de Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort qui dit : « La plus belle femme du monde ne peut donner que ce qu’elle a ». Cette citation est totalement fausse dans la réalité car, la totalité des recettes budgétaires du Togo n’est que le résiduel de ce que les agents de l’Etat déclarent avoir encaissé, c’est-à-dire le montant officiellement déclaré. Le pays serait sans nulle doute au double de ses recettes fiscales et douanières la gouvernance arrivait à canaliser tous ces flux financiers qui passent dans les circuits parallèles pour enrichir les réseaux occultes.
B. Douligna
« TAMPA EXPRESS » numéro 0076 du 30 avril 2025
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