Le Chef de l’État, Faure Essozimna Gnassingbé a présidé, ce 10 avril 2022 à Mandouri dans la préfecture de Kpendjal, une réunion de Conseil des ministres. Ce deuxième conseil des ministres dans la Région des Savanes du week-end après celle de Barkoissi n’a accouché que d’une souris pour ne pas dire d’un souriceau. Beaucoup de citoyen s’attendaient de grandes annonces sur les batteries de mesures devant atténuer l’inflation mais à l’arrivée c’est de la poudre aux yeux. La suspension provisoire de la TVM au Togo apparait comme un non-événement à entendre les populations. Une gouvernance qui finit par voler caractère humain des togolais. Ainsi, Faure Gnassingbé serait-il en train de violer les volontés exprimées par son défunt père Etienne Gnassingbé Eyadéma à l’occasion du 6e anniversaire du RPT il y a 46 ans et aujourd’hui les 10 ans d’existence de l’UNIR ?
Tout d’abord l’introduction de cette TVM au Togo n’est pas bien ficelée. Non seulement elle constitue une triple taxe (en plus celle sur le carburant et les frais de péage) au profit de la SAFER mais aussi il n’y a pas de période de couverture puisque exigible et valable pour une année fiscale. C’est-à-dire que vous achetez un véhicule en novembre par exemple et vous êtes contraint de payer pour l’année de l’achat et déjà au plus tard le 31 mars de l’année suivante, l’année d’après, vous devez payer encore le même impôt pour le même montant. C’est une véritable injustice le fait que les initiateurs n’avaient pas pensé à ramener la base de calcul de la TVM au prorata.
Le couple Faure Gnassingbé vs Victoire Dogbé toujours abonné au pingpong
Au Togo, selon les agrégats officiels, le taux de l’inflation a plus que doublé, passant de 0,7 % en 2019 à 1,6 % en 2020 et une prévision de plus de 2 % en 2022. Vu le niveau de la flambée des prix sur le marché depuis janvier et considérant la dernière augmentation du prix du carburant à la pompe, ce taux risque de tendre à plus de 3%. C’est pour lutter contre cette inflation galopante que le gouvernement togolais offre des mesures insuffisantes, inefficaces. Au nombre de ces mesures, la suspension de la TVM et l’appel aux banques pour la réduction des taux d’intérêts. Depuis la soirée du 11 avril dernier, c’était l’annonce conjointe du Ministre de l’Économie et des Finances Sani Yaya et son collègue des Transports Routiers, Aériens et Ferroviaires qui déferle sur les médias tant traditionnels que sociaux et occupe les discussions entre populations. Au point (3) dudit communiqué, le gouvernement Faure-Victoire annonce que cette mesure de suspension de la TVM vise à atténuer l’impact de l’inflation constatée sur les activités de transport de marchandise et de personnes… Mais les questions qui viennent immédiatement à l’esprit sont : Quelle sera l’efficacité d’une telle mesure sur l’inflation actuelle ? Puis combien sont-ils ces véhicules commerciaux qui paient la TVA sachant qu’il y a deal entre les conducteurs de ces voitures et les agents de la police routière ? Et enfin, quelle est la part de la TVM sur les prix des denrées surtout que les plus grosses augmentations concernent beaucoup plus les importations (dus aux divers chocs externes : Covid 19, flambée des prix de la logistique maritime mondiale etc., la guerre Ukraine-Russie pour le blé et le carburant…). Pourquoi ne pas aller vers une baisse de la TVA et agir sur la pression douanière et un contrôle efficace des prix sur les marchés par le ministère du commerce.
Visiblement, cet acte du gouvernement apparait comme de la poudre aux yeux, du rafistolage politique pur et simple. Ce nième pingpong gouvernemental semble être bien huilé depuis le début. Car un mois avant l’annonce de la suspension de la TVM, un communiqué du Commissaire Général de l’OTR, Philippe Kokou Tchodié avertissait les contribuables qu’ils devraient payer la TVM avant le 30 avril pour les entités et le 31 mars pour les personnels. Ceci étant, seuls retardataires et récalcitrants peuvent bénéficier de cet allégement puisque les citoyens dociles se seraient déjà acquittés. Comme en témoigne Kofi « Je venais de payer 30 000 FCFA (EUR 46) 2021 et 2022 pour cette taxe injuste, alors que nos routes sont des mouroirs et ceux qui ont bouffé les fonds du FER sont multimilliardaires maintenant et sont ni touche ».
La problématique de la baisse des taux d’intérêts des banques commerciales
Tous les ans, M. Sani Yaya, le Ministre togolais en charge de l’Economie et des Finances qui a succédé à son ainé Adji Otèth Ayassor appelle les banques installées dans le pays à baisser leurs taux d’intérêts pour faire fléchir l’inflation et encourager le financement des entreprises privées. Ce début mars 2022, il active encore ce feu qui refuse toujours de prendre. Ce qui est ridicule dans cette histoire est que le Ministre Sani Yaya lui-même sait que ce n’est pas possible pour les banques d’aller à l’encontre des règles de la BCEAO. Sani Yaya étant un ancien de la commission bancaire devrait bien le savoir. En effet, c’est la BCEOA qui joue un rôle de superviseur auprès des banques des pays membres de la zone UEMOA. C’est elle qui décide notamment du niveau du taux directeur, lequel détermine celui des taux d’intérêts des banques, puisque les banques empruntent une partie de leurs ressources auprès de la BCEAO pour mettre à la disposition du public. Les taux directeurs étant déterminés à partir de la santé économique de chaque État membre c’est-à-dire sur la base des données (agrégats) économiques que chaque pays membre lui communique par le biais de leur ministère de l’économie. Ainsi c’est à partir du taux directeur BCEAO que chaque banque détermine son taux selon le type de crédit en y ajoutant ses frais de fonctionnement, le coût du risque, les amortissements et provisions des anciens prêts non remboursés à la banque. Au Togo, le coût du risque est énorme lorsque les banques accordent des crédits souvent sous pressions politique aux gens proches du cercle présidentiel et qui ne remboursent jamais. Ce qui laisse des ardoises de centaines de milliards de crédits non performants dans les portefeuilles de nos banques. Au Togo, les barons, copains et copines du Chef de l’État doivent énormément aux banques, des projets comme les concessions de l’État entre autres POMAR, CECO-BTP, Groupe espagnol Pefaco (…) sans oublier la crise des coups d’État dans le sahel qui plombent la performance de l’économie. Ce qui inéluctablement fait monter les taux de crédits à la clientèle.
La période choisie par le Ministre Sani Yaya pour son annonce peut être aussi considéré comme provocateur. Primo, c’est à cette période de mars à fin avril qui coïncide avec les bilans que les nerfs des grandes entreprises et banques sont tendus. Sani Yaya oublie que c’est son gouvernement qui a poignardé les institutions financières du Togo dans le dos en octroyant un an de prêt obligatoire aux salariés en début d’année. Ce qui non seulement rend la vie dure aux fonctionnaires à ce jour mais aussi réduit considérablement la quotité des fonctionnaires vis-à-vis des banques. Le même secteur bancaire étant mis en difficulté par l’embargo commercial et monétaire sur le Mali. Que veut réellement au juste le sieur Sani Yaya ? Il était portant aux affaires lorsque le gouvernement auquel il appartient a bradé les banques togolaises à prix discount à des étrangers !
Pendant ce temps, que font les voisins de Faure Gnassingbé du club CEDEAO (UEMOA) ?
Au Ghana de Nana Akufo–Addo, le gouvernement a pris des mesures visant la suspension de la perception des frais de péage. Outre cette mesure, de grandes décisions sont prises dont la diminution des salaires des ministres et du président, le Ministre des Finances a également annoncé la fin des voyages à l’étranger pour les membres du gouvernement et de l’achat de véhicules importés jusqu’à la fin de l’année. Il a été également question de la diminution des prix du carburant de 1,6% face à la récente flambée des prix du pétrole provoquée par l’invasion russe en Ukraine.
En fin février, le président sénégalais Macky Sall avait annoncé en Conseil des ministres plusieurs mesures qui vont coûter globalement de près de 50 milliards FCFA (soit 76 millions d’euros) comme manquant de l’année 2022 dans la mobilisation des recettes de l’État. Il s’agit des subventions censées contenir et faire fléchir l’inflationniste sur les prix des denrées de première nécessité. On annonce également une baisse de 100 F CFA (0,15 euro) sur le prix du litre d’huile, de 25 F CFA sur celui du kilo de riz « brisé non parfumé » et de 25 F CFA sur celui du sucre a été décidée. Au niveau bancaire, le gouvernement sénégalais n’a pas simplement demandé aux banques de rabaisser les taux d’intérêts. Il a misé haut en accordant une subvention aux Institutions de Microfinance de son pays. C’est l’endroit privilégié où les citoyens modestes vont faire des crédits. Le Fonds National de la Micro finance (Fonamif) porte désormais ses taux d’intérêts à 8% au Sénégal.
De son coté, le Président Francis Talon ne cesse de multiplier les bons exemples pour le bonheur de son peuple. En dehors des genres Novissi et les subventions accordées pour atténuer les charges de l’électricité, l’État béninois a non seulement renoncé partiellement à la TVA sur riz, lait, huile, farine… depuis la fin de l’année 2020 mais aussi décidé d’un abattement de 50% sur le prix du fret maritime et de 2/3 pour le fret aérien dans le calcul des droits de douanes à liquider. Cette dernière mesure est très salutaire car permettant de réduire les droits de douanes sur l’ensemble des produits importés et de baisser systématiquement leurs prix de vente aux consommateurs.
Chez Alassane Ouattara en RCI, le gouvernement avait gelé les prix des biens de première nécessité depuis 2021 et en fin mars dernier, les prix des produits pétroliers, notamment ceux du gasoil, sont partiellement subventionnés grâce à une enveloppe budgétaire de 55 milliards de FCFA (83,8 millions d’euros). S’agissant des produits alimentaires, un plafonnement des prix s’applique durant une période de trois mois sur l’huile de palme raffinée, le sucre, le lait, le riz, le concentré de tomate, la viande de bœuf et les pâtes. Pour booster la production et la consommation locale, le secteur vivrier est subventionné.
Quand on va au Québec en termes de bonne gouvernance, par exemple tous les détenteurs de permis de conduire paient une redevance à leur date de naissance, cette année le gouvernement a décidé de diminuer cette redevance de façon drastique. La raison c’est qu’ils ont accumulé des excédents. Oui le gouvernement peut créer les taxes pour faire fonctionner la cité mais si visiblement ça ne donne aucun résultat, et que ça ne fait qu’enrichir une frange minuscule de la population c’est normal que ça vexe.
Le Togo est ce meilleur élève de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International. Un document du FMI sur le Togo montre qu’en le rapport recettes fiscales sur service de la dette dépasse le tiers. Qu’est-ce que cela implique : l’effort fiscal actuel sert à payer les dettes et donc une réduction de la capacité du pays à faire face aux besoins de développement actuel et une possibilité d’endettement à l’infini. Bref, nous avons du boulot, alors retroussons nos manches au lieu de faire du sensationnel. C’est cette bureaucratie internationale qui maintient les citoyens des pays africains dans la misère. Car il faut donner la priorité au remboursement des lourds crédits qui sont systématiquement siphonnés par l’occident et les sous-traitants locaux à travers des systèmes de corruptions institutionnalisés.
Et puis dans chaque crise, il faut chercher les opportunités. Cette crise peut constituer une belle opportunité pour booster la production et la consommation locale dans le pays. Si les importations deviennent trop chères et que le gouvernement togolais ne soit pas en mesure de baisser la TVA et accorder des abattements sur les droits de douanes alors il faut inciter à report modal de consommation sur les produits locaux. Le gouvernement de la RCI donne le ton en accordant des subventions au secteur vivrier.
Nonobstant les mesures classiques de lutte contre l’inflation et les folles dépenses d’une gouvernance clanique, Faure Gnassingbé doit aller vers la déflation ministérielle. Cela passe par la réduction du nombre de postes ministériel dont les ministres permanents en charge des affaires présidentielles et autres, le nombre pléthorique de conseillers au rang de ministres qui font des doublons occasionnant conflits d’intérêt et de compétences. C’est le gouvernement togolais qui a également innové avec la création d’une faculté d’apprentissage ministériel au portefeuille de l’énergie et des mines. Un inventaire clair des postes ministériels conduira à leur réduction. Procéder à la baisse des avantages et privilèges tant des ministres que des députés et autres postes clés de l’État peut également permettre de réaliser des économies en dépenses budgétaires. Le Ghana et la République de Côte d’Ivoire en ont pris conscience alors pourquoi pas le Togo. Sinon, la simple suspension de la TVM ne peut en aucun cas inverser la courbe de l’inflation.
Pendant ce temps, le SMIG est à 35 000 Francs CFA (EUR 53) dans ce rectangle togolais et l’allocation familiale est à 2 000 FCFA (EUR 3) par enfant et par mois, une insulte. Au même moment des gens perçoivent et cumulent plus de 700 000 FCFA (EUR 1067) comme jetons de présence en cassant des champagnes chiffrés à des millions de Francs CFA pour parapher un simple Procès-Verbal produit par d’autres. Et pire encore la condition chaotique des fonctionnaires togolais du fait du crédit obligatoire de Faure Gnassingbé aux salariés et qui les a appauvri d’avantage ces derniers. Le gouvernement de Faure Gnassingbé doit obligatoirement revoir sa copie pour soulager les populations.