Les techniciens de surface en service dans les palais présidentiels du Togo vivent des moments très pénibles. Ils sont environ huit pères et mères de familles qui sont employés depuis plus de neuf (9) ans, pour les plus anciens, par la société SOYEZ BENIS. Cet employeur les a placés à l’ancienne présidence du bord de l’océan, au nouveau Palais de la présidence de GTA et au domicile du Chef de l’Etat Faure Gnassingbé pour s’occuper de l’entretien des lieux. Sauf que depuis plus d’un an, ces employés vivent la pleine galère puisque sans salaire.
La société SOYEZ BENIS est une entreprise individuelle qui a été créée en 2011 avec pour objet « entretien et nettoyage des surfaces, création et aménagement des espaces verts, commerce général, import-export ». Au recrutement, ces agents, tous des Togolais pensaient atterrir dans le royaume des « merveilles » alors que c’est plutôt l’enfer. C’est seulement le nom qui brille.
Dire que ceux-là qui travaillent dans un milieu aussi sensible et stratégique que le « domicile », comme eux-mêmes aiment le désigner avec fierté, attendent leur maigre solde (salaire) depuis 1 an et 3 mois. Ces hommes et femmes sont criblés de dettes et certains ne peuvent plus subvenir aux besoins de leurs familles. On enregistre déjà des enfants de certains de ces employés qui sont exclus de leurs écoles pour faute de paiement de scolarité.
Alors qu’ailleurs les travailleurs autour de la présidence sont de vrais « bénis » de Dieu, mais au Togo, c’est la vraie poisse.
C’est même par abus de langage qu’on parle de salaire dans le cas de la société SOYEZ BENIS et ses assujettis. Car la définition du salaire ne saurait être une simple rémunération du travail. Le salaire se définit dans le cadre d’un contrat d’emploi de type synallagmatique donc entre deux parties (employeurs et employés) consentantes. Ainsi le salaire est l’ensemble des rémunérations ou des prestations fournies par un employeur à chacun de ses salariés en rétribution de leurs services. Il constitue donc la contrepartie nécessaire de la relation de travail légal. Il est souvent défini mensuellement et se matérialise par un bulletin de paie détaillé comportant les éléments du contrat notamment le salaire de base, le ou les sursalaires, les indemnités, les retenues à la source dont les cotisations sociales et fiscales.
Sauf que la réalité chez les BENIS est pire que les pratiques décriées dans la Zone Franche. Puisque rien de tout ce qui précède n’est mis en œuvre par cette entreprise détenue apparemment par un proche de la gouvernance. Il n’existe nullement de contrat de travail entre la société SOYEZ BENIS et ses travailleurs; la rémunération qui varie entre 40 000 FCFA (EUR 67,99) et 80 000 FCFA (EUR 121,96) pour les plus chanceux est définie à la tête du client. Sachant que le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) est passé à 52 500 FCFA (EUR 80,034) au Togo depuis le 1er janvier 2023. En plus le paiement de ces employés se fait main à main sans possibilité pour ces dernier de bénéficier des atous du service bancaire. Pas de cotisation à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) ni à l’Assurance Maladie Universelle (AMU) et encore moins des versements à l’impôt dans le cadre de l’IRPP.
Notre rédaction a pu évaluer les revenus de Soyez bénis en rapport avec les charges de personnel. Il faut savoir que le contrat ne semble pas être ce qu’on aurait pensé mais cela n’empêche de traiter plus convenablement les agents. Trois contrats sont signés à cet effet ; 8 millions FCFA pour pour la présidence du GTA, 5 millions FCFA pour le domicile et 3 millions FCFA pour l’ancien palais du bord de mer soit au total 16 millions FCFA l’an.
On note au titre de la rémunération de ces agents d’entretien que deux agents gagnent 80000 FCFA chacun, deux autres 50000 FCFA et les 4 restants sont à 40000 FCFA chacun soit au total 420000 FCFA le mois soit 50,4 millions de FCFA l’an. L’entretien des fleurs étant essentiellement une prestation dont la ressource essentielle est l’énergie physique, l’employeur peut faire mieux en montant la masse salariale, porter les plus petits au moins au SMIG soit 52500 FCFA et revoir les autres tranches tout en déclarant les 8 agents à la sécu. Allez voir si l’employeur même s’est déclaré à la CNSS.
Et pourtant chaque jour que Dieu fait, le Président de la République et son gouvernement ne parlent que de la création d’emplois et du bien-être des Togolais. Quand on intègre AMU dans les moteurs de recherche, comme Google, c’est l’image du champion qui apparait en première position… Pendant que la CNSS et l’Office Togolais des Recettes (OTR) traquent de paisibles citoyens dans les séries de redressements fiscaux à travers le pays, certains individus et leurs entités dans les sérails se la coulent douce, et au détriment de la masse.
Nos investigations autour de cette affaire révèlent que la société SOYEZ BENI déplore avoir adressé des factures de prestations de plus d’un an à la présidence sans être payée. Tout porte à croire que la présidence ne paie pas régulièrement ses factures d’entretien. Mais cela ne justifie pas que le personnel n’ait pas un contrat de travail et ne soit pas déclaré à la sécu. Et pire les arriérés de salaire n’arrangent rien.
Ils sont nombreux ces hommes et femmes qui gravitent autour de la Grande Maison et qui brillent par des pratiques qui ternissent l’image du pays de leur « Champion ». Il y a quelques semaines, c’était le cas de l’interpellation d’un agent de la CEET de l’Agence IPG Adidogomé. Le jeune releveur était tombé sur un cas de fraude d’un compteur de la CEET au niveau du quartier Zossimé non loin de l’église des Assemblées de Dieu. Il pensait faire bien son travail pour l’intérêt du bien commun en signalant la fraude. Mais à l’arrivée, les bruits avaient couru que c’était au domicile d’une autorité et qui avait intimé l’ordre d’arrêter le jeune détecteur de fraude (Colombo). Cependant, selon nos investigations, l’autorité en question qui a mobilisé la force de sécurité publique ne serait qu’un simple électricien en service à la Présidence de la République. Ailleurs la solidarité de ses collègues devrait être spontanée et un juge se serait saisi de l’affaire. Car la diligence avec laquelle l’arrestation du jeune agent s’était déroulée ferait penser à un vaste réseau de truquage de compteurs. C’est à croire que cet électricien à la présidence serait couvert par de nombreuses autres autorités tapies dans l’ombre qui bénéficient également de ce genre de fraudes. Pendant ce temps, la CEET traîne des dettes, les pauvres consommateurs d’électricité payent plus cher. Et avec ce niveau de corruption, on s’étonne que le pays manque d’argent pour diminuer le taux de chômage, de pauvreté et pour régler les énormes problèmes dans l’éducation, la santé et autres.
La Rédaction a interrogé un responsable de la Sté SOYEZ BENIS qui promet la régularisation rapide du dossier de ses employés laissés pour compte à la présidence.
B. Douligna
« TAMPA EXPRESS » numéro 0074 du 9 avril 2025
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