Au Togo, le Code des douanes 2018 en son article 357 Alinéa 2 précise « toute fausse déclaration dans l’espèce, la valeur ou l’origine des marchandises importées, exportées ou placées sous un régime économique lorsqu’un droit de douane ou une taxe quelconque se trouve éludé ou compromis par cette fausse déclaration » et article 376 « En plus des sanctions prévues par le présent code, ceux qui sont jugés coupables d’avoir participé comme intéressés d’une manière quelconque à un délit de contrebande ou à un délit d’importation ou d’exportation sans déclaration sont déclarées incapables d’être électeurs ou élus aux chambres de commerce, tribunaux de commerce et tribunal de travail tant et aussi longtemps qu’ils n’auront pas été relevés de cette incapacité. »
Commerçants, artisans,
professionnels, êtesvous dans la légalité ?
Volontairement ou non, parfois, qu’elle que soit les précautions prises, l’on peut se retrouver devant une situation et l’autorité publique ou administrative vous rétorquera « nul n’est censé ignorer la loi » ! ce qui est une véritable fiction, mais une maxime parfaitement applicable dans le monde de droit ! Loin d’être acceptable, cette situation est pourtant monnaie courante. Alors que le problème n’est pas nouveau, il ne semble toujours pas résolu. Pourtant, il semble essentiel que chacun soit en mesure de comprendre les lois de la république et la portée de ses engagements. En effet, que certains honnêtes citoyens veulent vivre dans la vérité, justice et transparence, d’autres délibérément choisissent la voie des faussaires ou encore d’autres parfois sont simplement victime d’une incompétence notoire. C’est le cas dans le commerce extérieur lorsque des Commissionnaires en douane communément appelés transitaires conduisent leurs clients dans des problèmes. Malheureusement pour eux, les Services des douanes togolaises sont de plus en plus suffisamment huppés pour traquer les éventuels fraudeurs. C’est ainsi que l’on peut franchir toutes des étapes de déclarations et aller jusqu’à la sortie des marchandises des postes douaniers mais quelques jours, semaines, même des mois après, vous pouvez être rattrapé et cela coûte très cher. C’est le domaine de compétence des services techniques de la Direction des Renseignement et de la lutte contre la fraude de l’Office Togolaise des Recettes (OTR).

Pour vous permettre d’appréhender le phénomène, nous allons mobiliser trois cas réels qui se sont déroulés au cours de cette année 2021.
Tout d’abord il faut savoir que lorsqu’une entreprise est au réel avec déductibilité de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), elle ne perd rien en la payant au cordon douanier. Il suffit d’obtenir le bulletin de liquidation de son transitaire pour passer les écritures comptables. Cette TVA représente autour de 75% de la valeur totale de dédouanement. Par conséquent, l’entreprise a le droit de déductibilité et la somme ainsi déboursée lors du dédouanement de sa marchandise n’est qu’un acompte. Aussi faut-il préciser qu’aucun document d’importation ou d’exportation (Facture, liste de colisage, BESC, connaissement…) pris isolement ne peut faire office de déclaration. Chaque déclarant doit veiller à ce que l’information introduite dans le Guichet unique et SYDONIA soit vraie. Cas d’un conteneur en conso et dont l’erreur de calcul des Droits de Douanes avait été découverte par un vérificateur de l’OTR suivi de négociation Monsieur Manani est un importateur togolais assujetti au régime du réel avec déductibilité de la TVA. Il est très honnête et exige toujours un travail propre de son Transitaire Agou. Monsieur Agou a souvent réalisé des opérations en tout professionnalisme sans soucis. Manani lui transmet les dossiers d’un TCS compris Bill Of Lading (BL) communément appelé Connaissement commercial, facture d’achat, liste de colisage, facture fret, BESC…Tous ces documents de commerce international sont de bonne foi. Le transitaire Agou procède aux formalités, passe la déclaration et liquide le DFU.

C’est au moment des dernières vérifications qu’un agent lui révèle que la déclaration est erronée. Que faire dans ces conditions ? Le destinataire met la pression pour la livraison et au même moment les 07 jours de franchise du conteneur s’expirent. M. Agou propose à son patron Manani de faire un geste à l’agent OTR pour tout régler. Il attire également l’attention de son patron sur le fait qu’en voulant corriger l’erreur, le risque de pénalité de l’article 357 s’impose. Tout le monde panique et le deal fut scellé. La marchandise a été libérée et livrer en magasin. Cependant lors du dépotage, l’un des agents des douanes présent constate que les marchandises contenues dans le conteneur sont de différentes propositions tarifaires. C’est visible pour tout profane car les pièces détachées ne sont pas de la même proposition tarifaire que les machines… Ce dernier produira son rapport de dépotage au bout de deux jours suivi d’une convocation immédiate de la Douane Port adressée à l’importateur. On dit bien « Nul n’est sensé ignoré la loi ». Quand l’on se réfère à la rigueur de la loi, l’importateur est astreint à payer les droits compromis de 1 116 000 FCFA en plus DDU de 7 838 000 FCFA déjà liquidée avant détection du problème. Et de surcroît les pénalités et amendes qui font le triple de la totalité des droits soit 8 954 000 (1 116 000 + 7 838 000) FCFA. Il faut également inclure l’argent de corruption irrécupérable et qui n’a pas servi de dissimuler l’erreur (fraude). Puisque l’erreur est systématiquement qualifiée de fraude quand la liquidation a déjà lieu. Leçon à tirer : D’abord l’erreur de calcul du transitaire était involontaire. Les transitaires togolais ont souvent des défauts. I) Soit ils versent dans la facilité et c’est le cas ici. Car au lieu de prendre la facture et la liste de colisage pour saisir la déclaration article par article et chacun avec sa position tarifaire, il a préféré un raccourci en saisissant l’unique position tarifaire qui figure sur le BESC pour l’ensemble des articles. Ce procédé d’utilisation d’une seule position tarifaire peut aussi désavantager l’importateur lorsque celle qui se trouve sur le BESC est la plus élevée. ii) Le second souci des transitaires est qu’ils sont souvent dans la posture de faire le moins disant ou vouloir favoriser l’importateur qui ne leur demande pas de l’aumône. Il s’agit d’une erreur monumentale à ne jamais commettre dans le contexte actuel de l’OTR. Lorsqu’on découvre une erreur, il faut l’expliquer et régler la différence car le législateur a introduit des souplesses dans l’application des pénalités. Une autre chose est d’être en face avec un agent des douanes qui comprenne que la répression est également une nuisance à l’économie. Ici, l’importateur est qualifié par le code de « adhérant à la fraude » c’est-à-dire « celui qui, sans participer à l’infraction à côté de l’auteur, sans exécuter les mêmes actes que celui-ci, s’est abstenu, sans raison valable, de signaler ou de s’opposer à la commission de l’infraction ».

Cas d’un engin d’occasion en conso qui a traversé les mailes de la douane jusqu’à livraison mais la division de renseignement et de l’analyse des risques veille au grain
Le même importateur Manani dans la diversification de ses activités cette fois-ci importe un lourd engin de chantier. Fidèle à ses habitudes, il transmet la documentation (BL, facture d’achat, facture fret, BESC…) à un autre transitaire au nom de Agbonékou spécialisé dans le transit de matériels roulants. Ce dernier constitue le dossier qu’il transmet à COTEC (Compagnie togolaise d’évaluation et de contrôle). Cette fameuse COTEC de Mark Antoine va passer environ 10 jours pour déterminer la valeur de l’engin. M. Agbonékou fait son travail de bout en bout et livre le matériel pour une valeur de douane (DDU) de 2 354 000 FCFA au grand étonnement de l’importateur. Car celui-ci pensait payer largement plus en tenant compte de la valeur inscrite sur le BESC et la facture d’importation. La joie de M. Manani sera de courte durée. Car deux mois plus tard, il reçoit une convocation des services de renseignement des douanes comportant le montant des droits liquidés et la copie du BESC. Il est accusé de fraude. Cette fois, la DDU compromises se chiffre à près de 9 millions FCFA et les pénalités et amendes feront le triple soit 27 millions de FCFA. La première sentence dans ces types de transaction est le blocage systématique de la maison de transit qui a produit la déclaration dans SYDONIA. Beaucoup de maison de transit ont eu ainsi des difficultés ou ont simplement fermé la porte pour avoir donné caution à des transitaires pour une modique somme de 20 000 FCFA. Ils n’ont pas souvent le contrôle sur les transitaires. Qu’elle soit de bonne ou mauvaise foi, c’est la caution qui est responsable vis-à-vis de la loi. Car il se peut que le propriétaire de la marchandise soit un occasionnel ou défaillant. Qui va alors régler le manque à gagner de l’Etat et les amendes ? Heureusement que dans ce cas d’espèce, l’importateur Manani est réglo et a procédé au règlement des droits compromis. Il n’est pas responsable de la faute et ne peut en aucun cas payer des amendes. Aller au contentieux jusque devant les tribunaux ? Il s’agit bien évidemment des réclamations relatives aux impôts et taxes qui ont pour but d’obtenir réparation d’erreurs commises soit dans l’assiette ou le calcul des impositions soit dans le recouvrement et aussi en matière de contrôle fiscal. C’est un droit qui est accordé au contribuable. Il faut souvent aller à l’amiable mais sans corruption. Leçons à tirer : Une fois encore la faute est au transitaire. Monsieur Agbonékou s’est versé dans la routine. Ils sont souvent abonnés absents à la non-mise à jour des connaissances au point d’ignorer que lorsqu’une marchandise est accompagnée de BESC, il faut obligatoirement travailler avec sauf si la douane le juge non-conforme. Ce qui a attiré l’attention de la Division de Renseignement de l’analyse des risques ici, c’est que la DDU a été liquidé alors que le BESC est demeuré intact dans le système (logiciel SYDONIA). On doit aussi accuser la légèreté de la société COTEC qui visiblement à tout faux ! D’abord sur tout BL est incruster les références du BESC lorsque celui-ci accompagne la marchandise comme c’est le cas. C’est-à-dire que même si le transitaire Agbonékou a été maladroit en leur transmettant ce dossier, les spécialistes de COTEC qui ont attribué faussement la valeur devrait rejeter le dossier. Pis encore selon les explications des agents de la douane togolaise, la sulfureuse société COTEC n’a nullement les compétences pour déterminer la valeur des engins de chantiers même s’il s’agit du second hand. Ils ont encore empiété sur le domaine de l’autorité publique. Ce qui montre à suffisance que le DG Marck Antoine et sa bande COTEC n’ont plus leur droit d’exister sur la Terre de Nos Aïeux. Il aussi faut rappeler de passage que le tarif douanier sur le matériel roulant à l’état neuf (moins de 5 ans) au Togo est beaucoup favorable depuis deux ans. Puisque les droits de douanes sont pratiquement exonérés de la TVA qui représente 75% de la valeur CAF. Mais encore, combien de togolais ont les reins solides pour acquérir des véhicules neufs. Qui est donc le déclarant en douane ? c’est « Personne morale ayant obtenu un agrément du ministre chargé des finances qui l’autorise à faire profession de déclarer en détail au nom et pour le compte d’autrui et à accomplir en douane les formalités liées à cette déclaration »

Enfin le cas d’un véhicule déclaré en transit sur le Sahel mais qui est appréhendé sur le territoire togolais par la Brigade de lutte contre la fraude avec une fausse plaque TG
Le présent scénario ne peut en aucun cas être mis sous le coup d’une erreur. Il s’agit d’une véritable fraude savamment orchestrée par le transitaire souvent avec la bénédiction de M. Atakplamitchè le propriétaire. C’est ce qu’on appelle dans le jargon douanier le « reversement ». Le reversement des marchandises est une bande organisée impliquant souvent importateurs et transitaires, certains agents véreux des services administratifs (douaniers, immatriculation, port). Ici, la voiture a été achetée dans un parc du port de Lomé et déclarée en transit sur le Sahel pour ne pas payer les droits de douanes qui débouche sur l’immatriculation. Une fois la voiture sortie du port avec les formalités d’expéditions, le transitaire fait disparaître l’engin et fixe frauduleusement une plaque togolaise. Parfois, le véhicule peut traverser la frontière et revenir par la suite à la faveur de la porosité de celle-ci. Cette fausse plaque provient parfois des réseaux de la Société Togolaise de Plaque (SOTOPLA). Il s’agit soit de la réimpression des plaques des véhicules totalement mis au rébus ou encore comme dans le cas d’espèce un véhicule en circulation mais à l’intérieur du pays. C’est le lieu de rappeler à tous ceux qui vendent les anciens véhicules immatriculés au Togo de faire la transaction de par les services notariés et pour ceux qui vendent à la casse d’enlever les plaques avant cession. Ces plaques peuvent se retrouver dans les braquages, contrebande de carburant et de drogue ou tout autre acte de grand banditisme. C’est aussi une pratique (fausse plaque) à laquelle se livrent certains affranchis au sein de la minorité pilleuse. Les fauteurs sont souvent démasqués car les agents de police, gendarmerie et surtout des douanes ont le flaire pour ce taquage. Tout observateur avisé peut aussi avec un peu d’attention porter de doutes sur les immatriculations en partant de l’état de la voiture, le modèle… La sentence ici est claire, Atakplamitchè sera amendé et règlera le triple de la valeur du véhicule. Imagine-s’il s’agit d’un véhicule de luxe ! Quant au transitaire véreux, la voie de la prison est grandement ouverte. Il y’a aussi quelques fois des agents des douanes, portuaires, manutentionnaires qui font sortir des conteneurs et camions de vrac sans aucune déclaration des douanes. Souvent pour ne pas dire toujours ces fossoyeurs sont rattrapés par le temps et reversés dans la fonction publique s’il s’agit de détachement ou simplement radiés. La fraude et l’évasion fiscale ne sont pas propres au Togo. Elles coûtent excessivement chère aux pays et surtout en occident où les lois protègent les citoyens. En occident, l’administration s’arrange tous les ans avec des contribuables dont la tentative de fraude fiscale n’a pas échappé à ses contrôleurs. Ces compromis s’expliquent par le coût pour l’Etat de la complexité fiscale. Alors, pour limiter la casse le fisc négocie des accords et propose des remises à l’occasion de contrôles fiscaux. Aujourd’hui, les innovations sont sans cesse insufflées par l’équipe managériale de l’OTR en direction des agents. L’élargissement de l’assiette fiscale doit être continuel afin de réduire la fracture fiscale et le fardeau sur les contributeurs.
FNK