En date du 12 septembre 2023, l’Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) a pris la décision n°132/ARCEP/DG/DJPC/23 portant encadrement de l’activité de wifi zone au Togo. Cette mesure fait suite à une volonté de l’opérateur TOGO TELECOM de couper les wifi zone, avec ses différents communiqués qui durent depuis février 2023. Certainement parce que les recettes ont fortement baissé car les populations ont trouvé d’autres alternatives pour communiquer…
En effet, l’opérateur a annoncé qu’il va procéder à la désactivation des lignes fibre à usage domestique, mais transformées en wifi zone. En réponse, l’ARCEP a, dans un communiqué, rappelé le caractère licite de l’activité de wifi zone et invité les parties prenantes, notamment « d’une part les fournisseurs d’accès Internet à proposer des offres alternatives favorables à l’activité du wifi zone et, d’autre part les fournisseurs de service à valeur ajoutée à se conformer aux dispositions qui encadrent l’exercice de ces activités ».
Quelque temps après, l’opérateur a mis à exécution sa menace brandie en février. C’est donc dans la foulée des coupures massives des abonnés Internet que l’ARCEP vient prendre la décision coléreuse qui fait objet de débats passionnants et passionnés.
Pour rappel, le Togo était le seul pays en Afrique noire francophone à être connecté à Internet par un opérateur privé national. Les cybercafés pullulaient dans tous les coins de rue. Mais ce sont les mesures malencontreuses du genre des décisions malvenues et incongrues du régulateur et une pratique commerciale désincarnée de TOGO TELECOM qui ont fait disparaître les cybercafés et retardé le pays en matière d’une réelle démocratisation de l’information et de la communication. Sinon, comment peut-on comprendre que le Togo qui était en avance dans les années 90 en matière d’internet, se retrouve aujourd’hui presque en queue de peloton ? Si hier, c’était l’éminent Professeur de droit des universités Palouki Massina qui, sous le couvert d’un rigorisme dénué de sens, prenait avec les différents directeurs s’étant succédé à la tête de TOGO TELECOM des décisions incompréhensibles qui n’ont pas hésité à tuer les cybercafés et la chaîne de valeur par des pratiques commerciales malsaines, aujourd’hui ce sont le ministre de l’Économie numérique, dame Cina Lawson (diplômée de l’Institut d’études politiques de Paris, en France) et son sbire Michel Yaovi Galley, un autre « venu de France», qui continuent de détruire le secteur des télécommunications/TIC dans ce pays.
Un peu de jus pour la compréhension des « nuls »
Contrairement au branchement anarchique et accidentogène d’électricité communément appelé araignée et à la floraison des forages dans les tous coins dont les eaux constituent un danger pour la santé humaine, l’activité de wifi zone est une pratique licite au regard du cadre légal et réglementaire qui régit les communications électroniques au Togo. En effet, conformément à la loi n°2012-018 du 17 décembre 2012 sur les communications électroniques (LCE), notamment en son article 10 et au décret n°2014-088/PR du 31 mars 2014 portant sur les régimes d’activités des communications électroniques, particulièrement en ses articles 32 à 37, l’activité de wifi zone en est une de fourniture de service à valeur ajoutée soumise au régime de déclaration à l’ARCEP. Elle n’est donc pas interdite par la réglementation en vigueur si elle est exercée conformément au cadre réglementaire, notamment la LCE, le décret sur les régimes, la décision N°226/ARCEP/DG/22 du 30 décembre 2022 sur les dispositifs composés d’appareils de faible puissance et de faible portée, prise en application de l’article 48 de la LCE.
En plus, la décision du 12 septembre vient étoffer le cadre réglementaire et apporte des précisions quant aux conditions d’exercice de l’activité de wifi zone. Ce qui en soi n’est pas une mauvaise chose. Elle entre d’ailleurs dans le champ de compétence de l’ARCEP. En effet, aux termes de l’article 10 alinéa 2 de la LCE, l’exploitation des services de communications électroniques relevant du régime de la déclaration « est soumise au respect de règles définies par l’Autorité de régulation » en ce qui concerne les points figurant à l’article 6.1 de la LCE. Au demeurant, le débat sur cette décision ne porte pas sur la compétence de l’ARCEP à prendre ou non une telle décision. Par définition, un appareil de faible puissance et de faible portée est fait de terminaux radioélectriques constitués d’émetteurs et/ou de récepteurs s de faible puissance qui permettent des communications unidirectionnelles ou bidirectionnelles pour des transmissions de faible portée et présentant un faible risque. Bien évidemment, une antenne omnidirectionnelle et directionnelle est au même titre qu’un routeur Canal Box et TOGOCOM dont le rayon n’excède pas 100 mètres. La spécificité du wifi zone commercialisé ou à usage personnel est de sécuriser les installations par un micro tic qui génère les codes. Tout spécialiste en protection réseau Internet conseillera vous de vous doter d’un micro tic pour éviter que n’importe quel quidam ne décode votre wifi. Car les mots de passe des modems qui sont commercialisés par TOGOCOM et CANAL BOX sont facilement décodés en quelques minutes, même par de petits enfants depuis leur téléphone portable.
Analyse d’une décision illégale et antisociale
La décision est articulée autour de dix (10) articles. Ainsi, après avoir précisé son objet (article 1er), l’ARCEP rappelle le régime juridique de l’activité de wifi zone : il s’agit d’une activité soumise au régime de déclaration auprès de l’ARCEP (article 2). Les articles 3 à 6 précisent les conditions de fournitures des services de wifi zone et les obligations incombant aux prestataires. L’ARCEP précise en outre que le dispositif pour faire du wifi zone doit être conforme à la décision 226 sur les dispositifs composés d’appareils de faible puissance et de faible portée (article 4).
L’obligation faite au fournisseur du service wifi zone, à l’article 6 alinéa 1er, « de prendre toutes les dispositions techniques ou organisationnelle pour identifier ses clients ou utilisateurs de ses services », bien que critiquée, est fondée, légitime et semble même moins contraignante que dans certains pays. Mais le véritable point de critique de cette décision réside dans l’interdiction du déport de la connexion Internet fixée à l’article 3. Au Togo, les fournisseurs d’accès à Internet ou FAI ne couvrent pas l’ensemble du pays et ce sont certains fournisseurs de service wifi zone qui ont amené la connexion dans plusieurs localités comprenant même des chefs-lieux de préfectures. La décision de l’ARCEP vient interdire cette pratique. Et même là où sont présents les opérateurs, la qualité laisse à désirer. Ce n’est pas le fournisseur du wifi zone qui offre une qualité meilleure…Le wifi zone est une alternative crédible à la cherté de la connexion tant fixe que mobile. Cette interdiction est d’autant plus incompréhensible que l’ARCEP, dans son communiqué du 15 février 2023, soulignait que « le wifi zone est un service qui participe à l’inclusion numérique en permettant aux consommateurs à faibles revenus d’accéder au haut-débit fixe à des tarifs beaucoup plus abordables que les tarifs prohibitifs en entrée de gamme de l’internet mobile au Togo ». Il s’agit d’un constat plein de vérités implacables que fait l’ARCEP elle-même en lien avec les recommandations internationales et la politique du « mandat social » de Faure Gnassingbé et son gouvernement. C’est dire qu’on peut encadrer la pratique du déport, mais pas l’interdire complètement quand on sait qu’elle vient combler les lacunes des opérateurs en termes de couverture et de prix des prestations. On ne peut crier sur tous les toits qu’on veut faire de l’inclusion numérique et en même temps interdire ce qui peut y contribuer.
En procédant ainsi, l’ARCEP sort de son rôle d’arbitre et de garant d’un marché des communications électroniques ouvert et se contredit par rapport à son communiqué de février quant à la contribution du wifi zone à l’inclusion numérique. En effet, en refusant le déport, l’ARCEP « protège » le marché pour les FAI et met un grand nombre de nos concitoyens sur le carreau et les exclut du bénéfice de l’usage de la connexion internet. On peut donc légitimement s’interroger sur les motivations de cette décision adoubée par dame Cina Lawson et son Michel Galley.
Tout ceci est la conséquence du désordre et du gaspillage des ressources qui ont cours dans ce secteur depuis des lustres. Il n’y a aucun plan ou programme sérieux d’aménagement numérique et de couverture du territoire, aucun programme cohérent pour la transformation digitale du pays. Les services se font sur des infrastructures vétustes mais on les acquiert sur la base des surfacturations. Malgré les milliards investis dans le secteur, le Togo n’a même pas l’infrastructure de base pour le développement des services Internet. Depuis son arrivée à la tête du ministère de l’Economie numérique, Cina LAWSON a bousillé l’argent du service universel qui devait permettre d’assurer une couverture adéquate du pays. Ces fonds n’ont servi qu’à réaliser des projets douteux aux impacts insignifiants, mais surtout à payer à coup de millions des études réalisées par des cabinets étrangers fantoches. Semble-t-il qu’au mois de mai 2022, le premier câble sous-marin de fibre optique de Google ”Equiano” dédié à l’Afrique, a été inauguré par le Chef de l’Etat togolais. Bien avant, Mme Cina Lawson serait allée à Dapaong à bord d’un avion spécialement affrété pour inaugurer un câble Internet. Mais que sont devenus tous ces investissements ? Le peuple tout entier (partisans, composants, opposants et neutres) attendent patiemment 2024 et 2025.
C’est le lieu de rendre encore hommage au compatriote Hervé Awïdê Pana qui s’est éteint en septembre 2022. Ce renard de la communication dont la disparition laisse ouvertes de nombreuses failles dans la communication de Michel Galley et son ARCEP. C’est lui qui non seulement allait au front sur tous les médias en français facile et avec élégance pour pénétrer les cœurs des populations, mais aussi coachait tous les intervenants dans le cadre de l’institution. On peut tricher l’œuvre, mais pas l’être. Toutes nos condoléances à la grande famille Pana et alliées. Cher Maître et Grand communicant, repose en Paix et que tes œuvres t’accompagnent.
Douligna