Les BRICS, ce sont d’abord deux populeux géants aux intérêts bien trempés (Chine et Inde), un aspirant géant dont le Chef du moment, en bisbille avec les américains, a raté de peu d’être en prison pour corruption plutôt qu’à la présidence de la république (Brésil) et deux nostalgiques de guerre froide que la lutte anti apartheid a diplomatiquement rapprochés (Russie et Afrique du Sud).
Ce sont ensuite quatre puissances nucléaires (Russie, Chine, Inde, Afrique du Sud) dont surtout trois sont “détonateurement” voisins ; Chine, Inde et Russie, ces voisins nucléarisés qui font semblant d’être ensemble au sein des BRICS, ne manquent jamais d’occasion pour se regarder en chien de faïence : ce n’est pas via ce regroupement BRICS qu’ils vont se faire confiance.
Les BRICS, ce sont finalement dans le même panier, deux démocraties émergentes et en verve sur le plan diplomatique (Brésil et Afrique du sud), une république despotique et puissance en déclin (Russie), un pays-système despote pur et dur en réussite (Chine) et un pays-système démocratique également en réussite (Inde). Chine et Inde, moteurs de croissance des BRICS, se sont toutes deux abreuvées technologiquement auprès des américains via une immigration intéressée ; Chine et Inde de ces dernières décennies sont en effet des bébés nourris au capitalisme et à la technologie américaines et de l’occident ; elles ont su grandir en se cherchant leur propre voie, comme ne savent jamais le faire les subsahariens. La Chine s’annonce de plus en plus anti-américains en raison de la position américaine pro Taïwan et l’Inde au contraire de plus en plus pro-américains pour disposer d’un allié de poids en Asie du sud-est.
Chine, Inde, Russie, Brésil, Afrique du Sud et divers aigris antiyankees, tout ceci fait panier à crabes pour en attendre du bon et du durable pour un signe monétaire en mesure d’assumer convenablement les trois fonctions d’une monnaie que sont les fonctions d’intermédiaire neutre des échanges, de réserve de valeur et d’unité de compte. Passent encore les BRICS-politique, mais les BRICS-monétaire c’est de la récréation dans la lutte contre l’hégémonique dollar US, plus pertinent et plus dominateur que jamais ; ce n’est pas demain la veille des obsèques du dollar-système. Pour se construire, difficile que les BRICS se passent du Dollar et des américains.
Moins politique et plus technique, la Chine a de sérieuses raisons de vouloir limiter ses excédents de balance des paiements en dollar US comme alternative à ses placements en bons et obligations du Trésor américain : elle sait que les américains lui feront à l’occasion le coup du blocage des avoirs étrangers dans leurs livres. La Chine étant première importatrice mondiale de pétrole, on comprend qu’elle milite en faveur de l’adhésion de l’Arabie Saoudite, premier exportateur, au BRICS : une fois cette adhésion actée, elle pourra compenser ses balances en dollars via des formules de SWAP ou échanges contre paiement croisé, direct ou indirect, en monnaie nationale avec l’Arabie Saoudite. C’est tout bonus pour elle car ceci va dans le sens de la monnaie BRICS en projet. L’Arabie Saoudite est également gagnante en partie puisque le système lui permet de réduire ses balances dollars, à condition de commercer davantage avec la Chine contre pétrole.
L’Inde par contre est le plus gros importateur d’armes au monde ; elle s’approvisionne de plus en plus et de préférence auprès des américains que des russes. L’enjeu d’une monnaie BRICS anti dollar US n’est déjà plus le même pour ce pays que pour la Chine. De plus, l’Inde, en s’endettant plutôt en dollar US via son approvisionnement auprès des yankees, tient les américains par le cordon de la bourse. Une monnaie BRICS anti dollar, c’est tout relatif et sans grand intérêt pour le géant indien, diplomatiquement et économiquement.
Dans ce méli-mélo des BRICS, les subsahariens, éternellement intéressés par des palabres de tout et de rien, vont naïvement porter leur espoir sur ce feu de paille de monnaie des BRICS, eux-autres qui sont endettés en dollar US et tiennent monétairement leurs créanciers par le bout de la monnaie américaine ; tous vont lorgner du côté des BRICS pour retarder le bon et vrai combat contre les déficits publics indus, contre la corruption, prioritairement des Chefs d’État et de leurs ministres et courtisans en particulier et en général, contre la mal gouvernance.
Aaah les BRICS ! Encore un sujet de distraction pour les dirigeants africains qui ne se lassent pas de se payer du bon temps récréatif au lieu de travailler, encore travailler et toujours travailler. Eh oui, les BRICS, faudrait-il le leur rappeler, ce sont et surtout des pays macro-économiquement en réussite et diplomatiquement en verve : ce que sont rarement les pays subsahariens.
Vilévo DEVO
« TAMPA EXPRESS » parution 0049 du 10 janvier 2024