Actuellement, sur la terre de nos aïeux, le Togo, il y a un déséquilibre très gibbeux de représentation politique, particulièrement dans les régions des Plateaux et de la Kara, qu’aucune logique ne soutient. Inopportunément, ce déséquilibre semble entretenu pour se garantir une majorité accommodante pour UNIR. Il faut y remédier, mais de la bonne maniéré.
Il faut corriger le tir, sans remplacer un biais par un autre. Le découpage électoral est multifactoriel et ne doit non plus exclusivement se limiter au poids démographique. Un découpage orienté uniquement « l’égalité » tend à donner une surreprésentation aux zones surpeuplées et un presque dénie d’existence aux régions moins peuplées. Ainsi, la région Maritime avec 10,73% du territoire et 43,67% de la population aurait ainsi 40 sièges; alors que la Centrale avec 23,77% du territoire et 9,83% d’habitants en aurait moins de 9.
Le découpage doit engendrer une représentation permettant d’orienter les politiques socio-économiques, car un député ne représente pas que la population, mais aussi un territoire dans sa diversité et sa singularité. Il faut une représentation effective qui intègre à la fois le poids démographique, le respect des communautés naturelles; notamment la densité et la croissance; l’accessibilité, la superficie, la configuration et les frontières naturelles du milieu; entre autres.
Certes l’Homme politique est réfractaire au « bon sens », à l’empathie et à une certaine lucidité. Il est un narcissique du pouvoir, des honneurs sans fin et a une préférence pour un découpage électoral à dessein. Aussi, ceux qui en tirent profit s’en accommodent, quel que soit leur bord politique. Seuls les leaders, les visionnaires en ont une aversion véritable.
Ainsi, lors des élections législatives de 2013, les partis ou regroupements politiques, toutes tendances confondues, tiraient profit du déséquilibre entretenu; dans un aveuglément ou opportunisme politique. Le peuple togolais reste toujours le même dans son désir d’équité dans la représentation ou la délégation de pouvoir.
Sur le plan macro, UNIR avait en 2013 remporté 62 sièges sur 91 (68,13%) pour seulement 46% de suffrages obtenus, CST (Collectif Sauvons le Togo) 19 sièges pour 28,9% de voix, AEC (Coalition arc-en-ciel) 6 sièges pour 10,8%, UFC 3 sièges pour 7,7% de voix.
Toutefois, sur le plan micro en termes de suffrages exprimés par siège, la CST avait eu 1 siège dans l’Ave pour seulement 7460 voix, UNIR dans la Kéran obtint 2 sièges pour 17807 voix (8903 par siège), l’AEC 3 sièges dans le Yoto pour 25 276 suffrages obtenus (soit 8425 voix par siège), etc. De l’autre côté du spectre, UNIR obtint dans le Grand Lomé 2 sièges pour 106 597 suffrages obtenus (53 298 voix par siège), l’ANC 7 sièges pour 322 546 suffrages obtenus (46 078 voix par siège) et l’AEC 1 sièges avec 49700 voix. Le Tableau ci-dessous donne un aperçu succinct de ce déséquilibre qui n’est pas circonscrit géographiquement ou seulement limité au septentrion. Il faut une solution d’ensemble.
Les législatives de 2018 accordent 59 sièges UNIR (65% des sièges), 18 indépendants (20%), 7 UFC (7%), 3 NET, 2 MPDD, 1 PDP et 1 MRC. Étrangement, les suffrages obtenus par parti ne sont pas publiés, encore moins par circonscription. On a surement conscience que les chiffres ne sont pas défendables, tellement le biais est hadal.
Le 5e recensement (RGPH-5) en 2022 au Togo donne 8 095 498 habitants; rurale à 57%. Bref la population en 2022 fait environ 5,61 fois celle de 1960, et elle doublerait aux environs de 2053. On remarque dans le tableau ci-dessous que certaines régions (Maritime, Savanes) ont vu leur poids démographique croitre de plus de 1,5% entre 2010 et 2022; alors que celle des Plateaux a décru de près de 1,3%.
Indubitablement, l’écart déjà disproportionné lors des législatives de 2018 avec une moyenne de 104 000 hbts/siège dans la région Maritime contre 45 290 dans la région de la Kara; soit 2,3 fois; se creuserait davantage. Ainsi la région des Savanes qui est la région la plus précaire, cependant la moins équipée du pays, aurait une moyenne d’habitants/député de 1,64 fois plus élevée que celle de la Kara; 1,44 fois que celle de la Centrale et 1,46 que celle des Plateaux.
Le Poids démographique ne doit pas être un absolu dogmatique
Il n’existe nulle part au monde un découpage électoral unifactoriel, car le territoire national n’est pas monolithique, unidimensionnelles ou à « variable inique », asynchrone et insipide. On observe que le poids démographique peut être prépondérant dans les fédérations (USA, Allemagne, Canada, Nigéria) qu’ailleurs, étant donné que les entités fédérées exercent le gouvernement de proximité.
Cependant, il y a toujours une marge relative. Ainsi les USA où le poids démographie pèse plus dans le découpage ont une moyenne nationale d’environ 752 109 habitants/siège à la Chambre des Représentants, la Floride a 769 221 hbts/siège, Rhode Island 528 657; le Delaware 989 948, etc.
Dans la fédération Canada, il y a un quotient de représentation de 111 116 habitants/siège doublé d’une marge de plus ou moins 25%. Également, on préserve les particularités. Ainsi le Yukon (482 443 km2, 34 666 habitants), le Nunavut (2 093 190 km2, 33 322 habitants), les Territoires du Nord-Ouest (1 346 106 km2, 43 675 habitants) ont chacun 1 siège, car très vastes et peu peuplés. Les Îles-de-la-Madeleine (205,5 km² et 11 000 votants) ont 1 siège.
En France, avec une moyenne nationale de 117 417 habitants/siège, la 2e circonscription de Haute-Garonne a 163 019 habitants/député, la 2e circonscription du Cantal a 62 753; la 1ere circonscription hors France (États-Unis et le Canada) a 231 328; la circonscription de Wallis-et-Futuna a 11 558 et celle de Saint-Pierre-et-Miquelon a seulement 5 974/siège.
Au Ghana voisin, sur la base des comparatifs de 2020, le déséquilibre est relativement sain. Ainsi le rapport de la moyenne la plus élevée d’habitants/siège par rapport à la moins élevée est de 1,59. Ce même rapport est de 2,4 au Togo voisin. Les Ghanéens ont donc un découpage plus équitable comme le témoigne le tableau ci-dessous.
Le découpage électoral : le principe de la communauté d’intérêts et non d’égalité
La communauté d’intérêts suggère principalement « une variété de facteurs possiblement en compétition ». Elle doit prendre en compte les caractères géographiques, démographiques et dans certains cas particuliers la nature économique, sociologique, linguistique ou culturelle des milieux.
Que proposons-nous comme découpage électoral pour le Togo?
Eu égard à ce qui précède, il faut un juste arbitrage entre le désir de représentativité et la communauté d’intérêts; avec une relative égalité du poids de vote. D’où la nécessité d’établir des normes ou conventions cohérentes.
Le tableau ci-après offre des simulations de répartitions. Il faudrait plus ou moins 30 sièges pour Maritime, 21 Plateaux, 12 Centrale, 14 Kara et 14 Savanes. Un réajustement doit être prévu par période de recensement.
Retrouvons l’orgueil d’un peuple libre et son cœur ardent s’emplit d’enthousiasme devant la tâche, certes rude, mais combien exaltante, qui lui est offerte.
Joseph Atounouvi