En 2007, je revenais de Waga. Notre bus a eu une panne. Toute tentative de réparer fut vaine. Les 60 passagers que nous sommes, sont partis en petit groupe en auto stop. Moi j’ai eu la chance de bénéficier de la clémence d’un chauffeur qui allait chercher son patron à Sinkassé dans une 4X4.
La route est longue on causait de tout et de rien pour resté éveillé. Il m’a posé la question suivante :
- Est-ce que tu aimes ta mère ?
- Je lui répondu que oui !
Il a sourit puis il a dit je vais te raconter un peu ma vie.
Ma mère s’est battue pour nous, je n’en dirai pas autant pour mon père. Je me souviens encore ce lundi. Le matin elle nous a fait asseoir au salon. Comme d’habitude notre père était toujours en mission. Quelles genres de missions, nous on était très petit pour comprendre. Ce que je sais, il était toujours absent. Mon frère avait 19 ans et ma petite sœur 6. Elle nous parlait comme si elle était avec de grandes personnes. « Mes chéris, si un jour vous souffrez de mon travail alors j’arrêterais ». Un mois plus tard, maman n’allait plus au service. Elle était secrétaire comptable dans une ONG. Les jours qui ont suivi, elle s’est fait faire une table et des étagères. Dans le garage, elle les a installées puis la vente des produits de mercerie a commencé. Maintenant quand nous revenions de l’école, le repas était toujours prêt. Sa décision nous a épanouis. La maison avait pris une autre forme de vie. L’absence fréquente de notre père fut adoucie par la présence, l’affection et l’attention de notre mère. J’adore cette femme. Plus tard je suis devenu adulte et j’ai compris le sacrifice énorme qu’elle a du faire pour nous.
La suite de mon récit est teinté d’amertume, de remord et de colère. Tous ces sentiments ont pris possession de mon être, alors j’ai perdu le contrôle. J’ai frappé mon père. Comment s’est arrivé ?
Mon frère Mathias a surpris notre mère entrain de pleurer dans la cuisine. Elle a fait un effort de nous faire le repas puis, elle s’est enfermée dans sa chambre. Comme je sentais la situation anormale, j’ai déposé mon sac puis je suis allé cogner à sa porte, mais hélas, elle ne la pas ouverte. Mathias m’a pris par la main et m’a rassuré que demain notre mère se portera mieux. Qu’elle a des maux de têtes et qu’elle a besoin de repos.
Des mois passèrent…
Mathias a eu une dispute chaude avec notre père. C’était la première fois. Il est sorti de la chambre de notre père en courroux. Qu’est ce qu’ils ont pu bien se dire ? J’étais au salon avec ma petite sœur. Il est rentré à grand pas dans notre chambre. Il s’est jeté sur le lit. Sur la pointe des pieds Ornella ma petite sœur et moi sommes rentrés le voir. Il pleurait. Dès qu’il a senti notre présence, il a essuyé rapidement les larmes mais il était trop tard. Je lui ai demandé ce qui n’allait pas et Ornella de rajouter si papa l’avait frappé ? Il a continué de mentir nous conviant de retourner au salon avec lui pour suivre notre dessin animé préféré « les frères DALTON »
Un jour, Mathias a ramassé toutes ses affaires de notre chambre et n’est plus revenu à la maison. Maman est rentrée au village avec Ornella. J’étais resté seul avec papa. Il y’a beaucoup de choses que ma mère et mon frère me cache. Je ne le sais pas exactement mais ce qui était visible, la relation entre mes deux parents était devenue conflictuelle.
Je suivais une formation en cuisine pendant les vacances. Parfois je faisais de petites prestations à l’hôtel où se déroulait ma formation. Je pouvais toutefois dormir quelques nuits là bas. J’avisais mon père les jours où je ne devais pas rentrer les soirs. Un jour, je suis rentré plus tôt que prévu. Papa n’était pas encore rentré. J’ai fermé le grand portail avec ma clé puis je suis allé payer du pain à la boulangerie du quartier. Au loin à 100 m, j’ai reconnu la voiture de papa. Deux silhouettes étaient à côté, naturellement celle de papa que j’ai vite reconnue par sa taille et son gros ventre. Puis une silhouette de femme. Je me suis rapproché pour être sure de ce que je voyais. Tapis dans le noir j’observais les faits et gestes des deux silhouettes. Elles sont rentrées dans la voiture. Bizarrement Papa est allé côté non chauffeur. Puis le véhicule a démarré, direction : notre maison. Je décide de ne plus continuer mon chemin pour la boulangerie, puis je me lance à grand pas pour la maison. Arrivé, le véhicule est déjà dans le garage. Papa a utilisé sa clé. La maison est tellement grande que le portail est loin de la villa. J’ouvre sans grand bruit, puis je marche sur la pointe des pieds. Je rentre par la cuisine doucement puis assis à même le sol, j’écoutais leurs conversations. La voix féminine a insulté copieusement ma mère. Mon père riait …Il disait que ma mère n’était même pas belle. Elle était seulement une poule pondeuse pour lui. D’ailleurs, il mettrait fin à leur relation. Cette dernière viendra l’année prochaine vivre dans la maison avec ces deux enfants.
Après avoir écouté toute cette conversation, tout est clair maintenant dans ma tête. Mes nombreuses interrogations ont trouvées leurs réponses. Le départ de mon frère et celle de ma mère avec la petite Ornella. Papa avait une relation extra conjugale. Une autre femme au bénin avec deux enfants qu’il a décidé de ramener au foyer. J’ai compris pourquoi, il ne s’occupait plus de nos frais de scolarité. C’est ce qui m’a amené à faire la cuisine. Cette voix continuait de chanter … Une rage s’est emparée de moi. Je suis sorti de ma cachette, puis j’ai cogné à la porte du salon, elle était presqu’ouverte. Papa sifflotait dans la douche. La femme était couchée presque nue sur le divan. Je lui ai demandé de partir de cette maison. J’ai saisie son sac à main que j’ai balancé dehors dans le noir. Elle est terrifiée de mon irruption. Je crois que papa a reconnu ma voix. Il est sorti prestement de la douche en serviette, la mousse du savon plein les oreilles. J’ai saisie la dévergondé que j’ai tiré jusqu’à la terrasse. Mon père me rossait de violents coups dans le dos mais je tenais solidement les bras de sa maitresse. Je ne supporterais pas de la voir une seule minute encore. Qui aurait pu faire de la magie pour que ma mère atterrisse à cet instant précis. Papa réussi à me faire tomber. La femme profita pour retourner au salon. Papa gardait la porte. Pris de colère, tel un taureau j’ai foncé sur lui. Il a été projeté par terre, la maitresse s’est enfermée dans la chambre à coucher. J’ai défoncé la porte puis je l’ai saisie de nouveau. Avec toutes mes forces, je l’ai tiré jusqu’au dehors. Papa s’est interposé de nouveau, je l’ai bousculé. Les voisins sont maintenant alertés par la dispute. Je lui ai dit de retourner d’où elle venait. Un instant papa est allé chercher son fusil de chasse. J’ai vite compris ce qui allait se passer. Ce monsieur est tellement hystérique que je me demande comment j’ai pu être sa progéniture. C’est comme çà que j’ai quitté le pays.
Donc tu es togolais ? Avais- je demandé car il avait carrément un accent burkinabais dans son parlé.
C’était l’œil du passager par ATCHAM Aposto