Pendant des années, le football au Togo a été source de fierté et de rassemblement. Pourtant, cet engouement, cet amour pour le sport Roi au pays du Dr Kaolo s’enfonce de jour en jour, entre résultats ternes des différentes sélections nationales, des clubs sur le continent mais aussi et surtout un manque d’infrastructures alors que des initiatives privées de construction de stade ont pu émerger dans un passé pas très lointain. Zoom sur le stade général Ameyi de Womé en passe de délabrement.
Impossible d’évoquer les grands noms du football togolais, sans citer celui de Gabriel Komla Kouma Mawulawoe Ameyi. Véritable passionné du football, il a été un acteur prépondérant sur l’échiquier du football au Togo et bien connu des instances internationales du foot.
Au paravent faiseur de Roi, il finit par accéder à la présidence de la Fédération Togolaise de Football (FTF) en 2010. Originaire du canton de Fiokpo, situé au sud est du Togo, cet ancien président de la Fédération Togolaise de Football, s’est distingué par sa vision de doter son équipe « Maranatha » d’un stade, illustrant ses ambitions dans le football togolais. Il signait à cette époque le premier stade privé dans son pays, ayant été homologué pour accueillir les coupes africaines. Fierté locale, ambition politique et sportive se sont vite mêlées à la danse pour finir par provoquer la déchéance de ce richissime homme d’affaire et homme politique.
Bien entendu au Togo, la déchéance politique ne reste jamais sans conséquence et la plus visible est désormais cet imposant stade de football qui est en ruine depuis près de 5 ans.
Sa plus majestueuse œuvre aura été sans aucun doute cet investissement dans la construction du Stade Général Améyi de Fiokpo, qu’il a dédié en la mémoire de son oncle, Mawulikplimi Améyi, chef d’état-major particulier du président Gnassingbé Eyadéma et qui malheureusement avait trouvé la mort en mars 1993. Il s’agit à ce jour du seul terrain de foot de l’intérieur du pays à abriter un match international (officiel) depuis l’indépendance du Togo en 1960.
On se souvient de toute l’euphorie, la phobie et la folie que les matchs amicaux, les rencontres du championnat national ou encore les matchs internationaux que le Stade Général Améyi de Fiokpo entrainait et toute la mobilisation autour. Adversaires et partisans se battaient pour être aux premières loges car, un déplacement de Womé n’était jamais gratuit quel que soit l’issue du match et aussi le rang social des visiteurs. Tous ; chefs traditionnels, pasteurs, journalistes, officiers, hommes de rang (…) député ne manquaient pas de remplir la maison de l’ancien député de Fiokpo où il ne manquait jamais du foufou et la danse traditionnelle « bobobo » .
Mais aujourd’hui c’est avec stupéfaction que l’on assiste au déclin de ce stade. Cette infrastructure dont l’initiateur même ne s’aurait donner le montant investi n’est aujourd’hui que ruine. Un investissement, presqu’une auto-construction, qui est intervenu à une période de « vache grâce », du militantisme sans faille et d’une naïveté absolue.
Aujourd’hui, « Gabi » devenu pestiféré et même « blacklisté », l’équipe Maranatha qui évolue encore sur ces installation se retrouve en difficulté depuis quatre saisons, gémissant entre Première et Deuxième Division…
La rupture du biberon à lait, a aussi impacter fort significativement le Stade Général Améyi de Fiokpo devenu méconnaissable. Murs et tribunes fissurés et crasseux, les grilles qui fondent de rouille sous les intempéries et le gazon vert a laissé place à la terre battue, bien sûr pas celle de Rolland Garros. Pire, l’accès au stade depuis le centre-ville de Kpalimé est un véritable supplice pour les véhicules, longue seulement d’une vingtaine de kilomètre, le bitume remonte aux années 70. Et pourtant, cette voie est internationale car, menant au Ghana voisin et aussi à la cascade de Womé, véritable site touristique de la localité.
Alors, que le gouvernement togolais crie à la professionnalisation par la voix de son meilleur chantre en la chose, le ministre des sports, Lieutenant-Colonel Lidi Bessi Kama, l’on est en droit de se demander s’il faudrait laisser cette œuvre totalement à l’abime alors que l’une des problématiques que soulève la professionnalisation au Togo est bien celle des infrastructures sportives ? Que font donc le président actuel de la FTF Guy Akpovy et les membres de la faitière dans ce sens, sachant que le pays ne possède pas à ce jour de camp de regroupement pour les équipes nationales ?
Dans ces conditions, l’Etat togolais peut tenter toujours une négociation avec l’initiateur pour en faire un bien public. Les potentialités sont encore immenses ; la possibilité d’exproprier des parcelles environnantes pour son agrandissement et aussi l’agrandissement et la modernisation du tronçon Kpalimé-frontière Ghana, passant par Womé ne peut que permettre une rentabilisation de la route rénovée Lomé-Kpalimé.
C’est aussi le lieu d’attirer l’attention du gouvernement togolais sur le projet pharaonique de l’autre ancien président de la FTF, Tata Adaglo Avlessi qui est en abandon depuis des années. Au-delà de l’infrastructure, l’Etat peut mettre la main sur ces fonciers qui constitue déjà une base pour la construction des infrastructures sportives modernes.
Tout comme le président Faure Gnassingbé a financé les rénovations des stades municipaux de Kpalimé, Notsè, Sokodé, Kara et Atakpamé, il peut en faire de même ailleurs comme à Womé et pourquoi pas la reprise des travaux du Stade Municipal de Bassar dont les travaux de réhabilitation promis par lui-même peinent à prendre forme.
Francisco Napo-Koura
« TAMPA EXPRESS » numéro 0074 du 9 avril 2025