Jadis une compétition sportive et spirituelle dans le septentrion.
Si aujourd´hui la lutte “Evala” est devenue l´apanage du seul peuple “Kabye” dans le nord du Togo, cela n´a toujours pas été ainsi. La lutte traditionnelle a été pendant des siècles une distraction dans le boréal. Bicambi (les Bassar), Kotokoli, Lamba et Kabye se livraient à cette compétition populaire, qui se passait souvent les jours du marché, ou bien sur les places publiques des villages.
Aujourd´hui en pays Ncam cette tradition est presque passée aux oubliettes. Dans le Canton de Kabou, par exemple les gens se rappellent encore. « Mon grand-père Aman était un sacré Champion de lutte traditionnelle, où l´on s´affrontait non seulement physiquement mais plus sur le plan spirituel. Ainsi un jour un jeune Lamba a fait le tour du marché, et avait terrassé tous les vaillants lutteurs de Kabou. Quand mon grand-père apprit cette humiliation, il se précipita au marché, mais il fut aussi terrassé ! Il revint en courant à la maison, son père (mon ancêtre) lui donna trois petits piment de frotter à la main et de repartir! Il le terrassa à son tour trois fois de suite l´étranger qui défiait tout le village et racheta ainsi son honneur » raconte l´artiste Nadjiwaré.
La lutte était souvent organisée entre les quartiers et se déroulait souvent au clair de lune. Le but premier était de choisir les meilleurs lutteurs pour les affrontements populaires entre communautés les jours du marché. Par ailleurs on luttait pour des gages, pour les femmes, pour les lingos de fer et autre récompenses puis aussi pour son honneur.
La lutte traditionnelle a disparu peu à peu des quartiers et de nos jours presque inexistante en pays ncam. Plusieurs raisons lointaines ont précipité sa fin, telle que, entre autre les préparatifs mystiques que certains participants employaient sur leurs concurrents, le caractère violent des luttes non encadrés avec des fractures, des blessures mortelles et il faut noter le nouvel ordre social imposé pendant la colonisation qui interdisait toute forme de manifestation populaire et pour finir les nouvelles classes sociales, surtout les jeunes générations qui tournaient dos aux anciennes formes culturelles et traditionnelles.
De nos jours seul le pays Kabye a su valablement conserver cette tradition ancestrale dans le boréal grâce à l´effort personnel du Général Gnassingbé Eyadéma avec sa politique de l´authenticité axée sur le retour à la culture africaine. La volonté des natifs Kabye a redonné une dimension culturelle, sportive et spirituelle de cette practique ancestrale qui n´a plus de traces que dans les mémoires collectives dans le pays ncam.
“Evala” (en Kabyè) ou bien “Dmoor” (en Ncam chez les Bassal ou Bassar) pouvait être une compétition sportive à l´échelle nationale, une discipline de l´éducation sportive où chaque préfecture présenterait son équipe, pour participer en Juillet à Kara à cette rejouissance populaire, car la lutte traditionnelle est dans le sang de tout Togolais.
Napo Labodja
(Idée artiste Nadjiwaré)