Quant au rejet épidermique du Franc CFA, susceptible de conduire à une sortie de l’Umoa, de l’Uemoa, de la Bceao, de la BOAD, de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) et de la BRVM …, c’est une toute autre histoire car, tout ceci est juridiquement et intrinsèquement lié ; mais sait-on jamais en matière de mal gouvernance. C’est bien dommage que le dossier des coups d’État des pays fondateurs de l’Alliance des États du Sahel (AES) ait été géré avec autant de laisser-aller et d’inhumanité. À mon avis, il faut déployer tous les moyens, surtout diplomatiques, amicaux et relationnels ainsi que tous les usages souterrains pour faire revenir les pays de l’AES sur leur décision de sortir de la CEDEAO.
La CEDEAO ne marche pas bien mais c’est un mal nécessaire pour le vivre ensemble dans la sous-région ouest-africaine et au delà : il faudrait juste la dé-politiser en revenant à sa vision économique un brin technique de départ.
Le Maroc qui veut exploser la Cedeao_ ? Il faudrait élaborer un peu pour notre gouverne. L’ AES se laisser embobiner par le Maroc ? Quels avantages ? Géopolitiques, sécuritaires, macroéconomiques … ? Les pays de l’AES sauront-ils se faire aspirer vers le Maghreb là où la Mauritanie a échoué ?
Je pense que les pays de l’AES et particulièrement le Niger font un pied de nez à la CEDEAO par dépit. Il devrait y avoir de l’espace pour les faire revenir à la “Maison” car ils sont juste fâchés à cause des sanctions à leur encontre. C’est souhaitable qu’ils ne quittent pas la CEDEAO.
Le Maroc n’y est visiblement pour rien dans les moments difficiles de la Cedeao et les délires de l’AES. Non seulement, il faudrait que les pays concernés renoncent à quitter l’insincère et peu commode CEDEAO, in fine syndicat de Chefs d’État pas toujours vertueux ou compétents, mais ils devraient mettre à la poubelle leur affaire d’Alliance des États du Sahel AES machin qui fait sérieusement gadget désordre, discorde et clanique ; il faut autre chose et moins clivant pour toiletter la CEDEAO en panne de discernement et de leadership.
Pour y arriver, il faudrait au préalable que les caciques de la CEDEAO remplacent carrément leur bissap par de l’eau, reconnaissent les putschistes en place à Bamako, Ouaga et Niamey comme l’auraient fait les fondateurs militaires putschistes de la Cedeao, Étienne Éyadema du Togo et Yacubu Gowon du Nigéria, puis surtout les laissent tranquilles avec leur russe, leur Wagner, leurs oignons internes et tout ce que ça emporte comme rapports de force, pour ne pas dire rapports de mal gouvernance dans la sous-région. Il faudrait aussi se rendre à l’évidence que les tenants du pouvoir à Bamako, Ouaga et Niamey boivent comme des potions magiques les balivernes des surdoués de com, néo démagogues champions de fake-news monétaires et polémistes virtuoses que sont les Franklin Nyamsi, Nathalie Yamb, Kémi Seba et compagnies … ; les caciques de la Cedeao se doivent de tenir compte de cette toxique donne et inventer des contre-potions salvatrices.
Bamako, Ouaga, Niamey, qui rêvent aussi de destin monétaire historique (et farfelu au demeurant) pourraient, sur un coup de mal gouvernance de trop, s’acharner sur le signe monétaire Franc CFA qui leur a pourtant abondamment donné à ce jour ne serait-ce qu’en termes de pouvoir d’achat. Il faudrait se rappeler à ce propos qu’il s’agit de trois pays coutumiers de déficit de politiques économiques offensives alors même que ce sont de solides et traditionnels dépositaires d’abondantes et permanentes réserves de change dans le pool commun Umoa ; faut-il comprendre que c’est la faute à la France, ce manque criard de pertinence des gouvernances économiques ? Le Niger est récurremment cité parmi les pays les plus pauvres au monde alors même qu’il déborde en permanence de réserves de change sonnantes et trébuchantes dont apparemment les tenants successifs du pouvoir d’État n’ont jamais su quoi faire dans l’intérêt des populations. Il faut être moins oisif, plus entreprenant et compétent comme Chef d’État, travailler davantage et mieux dans les pays de L’AES ; ceux-ci se privent de situations monétaires à leur avantage au lieu de s’assoir avec des gens compétents pour concevoir des politiques publiques porteuses de croissance et de développement. Ces pays ne sacralisent pas suffisamment le travail et sont ruinés par la corruption et les discours victimaires.
Il faut être de mauvaise foi pour nier le fait que les tenants du pouvoir dans les pays concernés sont aujourd’hui ivres de visions messianiques, car devenus perméables aux thèses populistes anti France et anti Franc CFA …, sans plus aucun rapport avec leur serment originel de conduire une transition politique de durée consensuelle. Il faudrait en tenir compte singulièrement dans la gestion de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) en observant un scrupuleux respect de ses textes fondateurs d’une part et d’autre part, en communicant en français facile sur combien son vivre ensemble monétaire et solidaire est différent de la présentation grotesque dont fait l’objet son signe monétaire F.CFA sur les réseaux sociaux.
Par ailleurs, la Cedeao devrait admettre que les tenants du pouvoir dans les pays de l’AES se sont radicalisé et se présentent désormais, à tort où à raison, en _Homme-fort_ modèle “Père de la Nation”, parrainés par les russes comme leurs prédécesseurs putschistes l’ont été ou le sont par les français.
Il y a de vrais risques que le nouvel ordre qui se dessine dans la sous-région à coup de ras-le-bol de putschistes partout où la société civile et l’opposition politique ou syndicale ont été assassinés, fasse d’inutiles et importants dégâts et accouche de regrettables désillusions.
Les fautes sont sans doute partagées dans ce qui oppose l’AES à la CEDEAO. Chacun a dès lors une partition raisonnable à jouer, si tant est que le vivre ensemble apaisé laborieusement en construction dans la sous-région tient à cœur à tous.
Il faut quand-même se rendre à l’évidence que les Dirigeants de l’AES font avec régularité et davantage que quiconque dans l’extravagance, la provocation et les sautes d’humeur ; y a-t-il seulement des dossiers de faisabilité de toutes ces mesures tonitruantes et structurantes (ou plutôt dé-structurantes) qu’ils annoncent par voie de communiqué à la télé ? Pas sûr : des réunions passionnées entre responsables et courtisans de même bord, sans doute.
Force est malheureusement de constater que c’est qui va zapper de manière effrontée les règles de vivre ensemble convenues et en vigueur, se river contre vents et marées dans des postures inflexibles, voire se montrer agressif, jusqu’au-boutiste et le plus destructeur.
Dommage que la légalité et la légitimité soient de plus en plus banalisées dans la sous-région au profit d’humeurs, souvent barbares, de ceux qui tiennent les rênes du pouvoir d’État.
Vilévo DÉVO
” TAMPA EXPRESS » numéro 0051 du 07 février 2024 “