Le président du géant nigérian, Muhammadu Buhari et ses homologues de la Communauté Ouest-africaine ont-ils peur de gérer leur propre monnaie ?
A cette allure, l’ECO nom attribué à nouvelle Monnaie unique de la CEDEAO ne verra pas le jour cette année comme annoncée. Bientôt, plus précisément dans 36 jours, l’année 2021 prendra fin. Inertie, hypocrisie et médisance ont pris d’assaut le camp du syndicat des Chefs d’Etat de la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). L’information a été rendue publique à l’issue de sa session du 23 janvier de cette année « La CEDEAO suspend son pacte de convergence et repousse l’Eco ». Une décision des premiers dirigeants (francophones) de la sous-région et du jeune machiavélique-colon Macron adoubé par le chef des sous-traitants ADO…… Elle prend ainsi le contrepied de l’initiative des députés français en début de l’année 2020 qui avaient déjà voté l’adhésion à l’Eco FCFA sans la ratification des pays concernés. Une fois encore, les africains font marche arrière devant un processus qui a démarré depuis 1975!
Si pour certains profanes, les Chefs d’Etat viennent de dribler Emanuel Macron et Allassane Ouattara, pour les économistes avisés, la raison de convergence qui est souvent évoquée ne peut être qu’un cache sexe ! Ou en d’autres termes, une incapacité des présidents, surtout ceux de l’UEMOA ayant en commun le Franc des Colonies Françaises d’Afrique (F CFA) de s’affranchir vis-à-vis de l’impérialiste. En effet, la convergence est très éphémère dans la décision de la monnaie unique. Car, on peut fixer les critères, mais ce n’est pas le respect de ces critères de convergence qui conditionnent la création d’une monnaie unique ou d’une zone économique unifiée. La convergence est un fait mineur, mais la condition suffisante est une question de volonté politique d’y parvenir. Surtout que le concept de la convergence est un processus dynamique et non statique. Autrement dit, si par extraordinaire tous ces pays convergent à une période «n », (ce qui n’est d’ailleurs pas réalisable), puis crée la monnaie unique, et si par cette mauvaise gouvernance dont-on les connaît ou un cas de force majeur comme le Coronavirus les fait diverger plus tard en année « n + x », vont-ils retourner au point de départ? Est-ce qu’à l’instauration de la monnaie coloniale les penseurs avaient vérifié la convergence avant d’imposer le FCFA depuis 1945? L’énigme vient du fait que depuis 46 ans de réforme, seul le microcosme Togo sous Faure Gnassingbé parmi tous ces 17, se targue d’atteindre les objectifs de convergence. Lorsqu’on analyse de près le tissu économique du Togo et ses agrégats, il y a lieu de craindre un lendemain plus incertain lorsque les autres pays vont vouloir faire le « Copy-Paste », comme ils en ont l’habitude pour s’incruster au pouvoir. Aussi, les initiés peuvent- ils apercevoir facilement et clairement que, la convergence telle que servie par les autorités de la sous-région serait nominale et non réelle ? C’est cette dernière qui est même plus importante car, permettant de mesurer la force économique ou de production des pays. Au demeurant, le seul critère qui permet l’utilisation d’une même monnaie dans au moins deux pays est la confiance que les peuples ont en cette monnaie pour servir les trois principales fonctions de la monnaie que sont : l’unité de compte, la réserve de valeur et l’intermédiaire des échanges. L’une des illustrations parfaites et usage ancestral est le troc (confiance et mesure) qui constitue les échanges directs des biens sans l’intermédiaire de la monnaie. A tout cela, s’ajoute la problématique de coordination de l’unicité des politiques budgétaires. C’est en cela que la politique publique du géant chinois ou des USA qui ont un seul président sera plus cohérente que celle de l’Europe qui a plusieurs présidents donc 27 politiques budgétaires. L’Europe a-telle vérifié les critères de convergence pour créer l’EURO des 27 ? L’exemple vivant de la Grèce qui avait masqué ses agrégats pour être éligible et c’est la raison pour laquelle elle a été secouée par la grosse crise entre 2008 et 2018. Dans les théories économiques, il y a plusieurs écoles de pensées dans le domaine monétaire qui s’affrontent en bonne et intelligible cohabitation. Quand certaines écoles de pensée préconisent d’aller dans la monnaie unique sans parler de critères de convergence, d’autres économistes de grands renoms maintiennent la position de critères de convergence… Où étaient toutes ces écoles lorsque les grecs ont triché et quelles est aujourd’hui la position de toutes ces grandes écoles en ces moments où la Covid-19 qui est venue mettre en cause tous les principes budgétaires et de gouvernances ?

Tous les panafricanistes doivent dénoncer cette hypocrisie des dirigeants africains qui ne font rien de concret pour aller dans l’union. On a fixé des critères de convergence, dont presque personne ne respecte lesdits critères. Pourquoi ne pas revoir ces critères ? Alors que ce sont les Africains qui connaissent le mieux, les livres saints que le blanc a subtilement introduit en Afrique. Pour être plus basic, la monnaie et l’emploi sont les deux phénomènes les plus complexes pour les économistes. En ce qui concerne le volet monnaie, les décideurs peuvent même décréter la monnaie unique dans les 15 pays, il n’y aura rien (Théorème d’impossibilité d’Arrow). Car la création d’une monnaie ne se discute pas dans la rue. En la matière, la convergence étant un critère mineur, c’est l’adhésion des populations, ou la confiance à un ‘’commun’’ qui est cette monnaie unique qui donc, est le critère fondamental. C’est pourquoi, le mécanisme du référendum existe. C’est même ce que dit la théorie la plus optimale. En effet, selon cette école, une zone monétaire optimale (ZMO) est une région géographique dans laquelle il serait bénéfique d’établir une monnaie unique. La théorie de la zone monétaire optimale a été développée dans les années 1960, principalement par Robert Mundell. Une zone monétaire optimale peut regrouper plusieurs pays ; elle peut aussi ne concerner que quelques régions d’un grand pays. Le cas atypique de la Grande Bretagne qui était dans l’Union Européenne sans avoir abandonné la Livre Sterling. C’est d’ailleurs le pays de Keynes dont l’école associée au post-keynésiens ont souvent critiqué l’existence de la monnaie régulée par une institution internationale. La preuve est non seulement que le Royaume Uni n’a jamais opté pour l’EURO duquel il vient de se retirer avec à l’arraché un accord qui ne les pénalise pas du tout. Tous le club UE était contre, mais Boris Johnson est sorti la tête haute avec un soutien populaire. Toutes les écoles ont leur critique et c’est tout une batterie de réflexion à mener pour faire un choix lorsqu’on veut y parvenir. Les théories décrivant les conditions préalables à la création d’une union monétaire comme dans le cas de l’ECO ne peuvent être que des critères ex ante. Les critères traditionnels peuvent en effet évoluer dans le temps et sont endogènes au fonctionnement d’une zone monétaire; l’important est de les apprécier ex post. Ces critères secondaires peuvent être définis comme : l’homogénéité des préférences, la diversification des productions, le sentiment d’appartenance à un ensemble commun, la distance et la taille économique, une langue commune. Que faire donc lorsqu’on souhaite créer une union monétaire alors que ces critères ne sont pas vérifiés? On change simplement de théorie. C’est ainsi qu’un profond renouvellement de la théorie a été opéré depuis la fin des années 1990. En effet, la création de la Zone EURO ne peut être légitimée par les théories des zones monétaires traditionnelles. Alors une nouvelle approche, dite des critères endogènes, postule que l’union monétaire produit d’elle-même les conditions de son optimisation. De cette manière, il n’est plus possible de constater d’écart entre la théorie et la réalité a priori, mais uniquement a posteriori. C’est dire qu’à cette allure, l’ECO ne verra jamais le jour, sauf si le Nigeria de Muhammadu Buhari (dans son deuxième et dernier mandat) qui a déjà une forte expérience en matière de gestion de monnaie unique pour 36 Etats, ses homologues du Ghana et les autres amis de la France ne décident autrement. En conclusion, soit les autorités décrètent la monnaie unique, soit par voie parlementaire, soit par référendum.
FNK