Quand je suis rentré dans le bus, tout le monde racontait sa mésaventure avec les prestations dans certains centres de santé publique. Personne ne parlait en bien de ces structures. Quand tous racontaient, j’avais envie de pleurer. Parce que nul ne va à l’hôpital par plaisir. Parfois ce n’est même pas vous le patient. Vous devenez une marionnette pour le personnel. Je me souviens de mon pèlerinage au CHR. Ce récit que je m’en vais vous raconter est un court extrait d’un roman en gestation en marge d’un recueil de tous mes récits de voyage dont vous appelez de tous vos vœux. Soyez en remercié chers lecteurs.
Ma femme et moi sommes arrivés à 05h au CHR. Nous avons loué un taxi. Je vous assure que nous avons été surpris de voir une longue queue croyant être les premiers sur les lieux. J’ai réussi à prendre le numéro d’ordre. Le numéro était 13. Après 03 heures d’attente, le médecin traitant est arrivé. J’ai poussé un ouf de soulagement. Ma femme tenait notre petite malade entre ses mains. Trois jours successifs, on n’a pas fermé l’œil de la nuit. Maintenant celui vers qui on nous a référé dans ce grand hôpital est là. Enfin on sera soulagé dès sa consultation. Je tenais toutes les analyses préliminaires qu’on nous a demandées. Comment nous avons pu faire toutes ces analyses, c’est aussi une autre paire de manche. L’essentiel était que je suis présentement le patient qui doit être reçu par le médecin selon mon numéro d’ordre. Mais bizarrement, devant moi les gens défilent et rentrent. Ils sont consultés et ressortent tous joyeux. Je n’ai pas vu le temps passer. Il vient de sonner 11h. Ma femme me demande de faire un forcing pour rentrer, si on me renvoie, j’aurai tenté quand même. Une demoiselle en blouse est venue cogner à la porte du médecin, puis elle est rentrée. Bien avant, elle a marqué une pause dans le couloir pour téléphoner. Je l’ai bien observé. Elle portait des balafres d’origines Lamba. Je me suis dis que je suis sauvé. Elle a même dans sa conversation placée quelques mots en Lamba de Kantè. Elle est ressortie puis elle est rentrée avec un patient. Ça devenait affaire de connaissance. Alors je devais exploiter cette option. J’ai prié qu’elle sorte de nouveau. M’bo ! La voilà de nouveau seul au fond du couloir. Je me lance à sa poursuite ma femme m’a suivi avec l’enfant. Dès que je l’ai rattrapé, j’ai salué poliment en Lamba. Elle a fait semblant de n’avoir pas bien saisie. Puis elle m’a demandé en éwé ce que je lui disais. Elle m’a ramassé sauvagement puis elle a continué sa route. Je venais d’être humilié devant ma femme par une de mes sœurs. Je vous jure que ses balafres ne peuvent pas me tromper pour avoir étudié les sens et les origines des balafres qu’elle portait « kpayi, kpayi » sur ses deux joues. Je suis resté hébété près d’une minute. Madame m’a tiré par la main, nous sommes partis nous rassoir. A 11h 37 le médecin est sorti avec son sac, il n’était plus en blouse. Il est parti sans dire un mot. On était encore 8 patients sur le banc d’attente. Ma désolation pesait à présent deux tonnes. J’ai levé ma tête, j’ai vu ma fille qui respirait difficilement entre les bras de ma femme. Je n’ai pas pu me retenir. J’ai fondu en larmes. Ma sœur teint clair aux grosses balafres, la renégate est venue nous annoncer de partir et de ne revenir que le mercredi car, ils ne reçoivent pas les mardis. Le médecin a une urgence avait-elle conclue. Ne sachant où aller car n’ayant pas de proche dans les parages, nous avons passé deux jours dans les couloirs du CHU, en plus dans le froid et à la merci des moustiques… j’ai écourté mon récit car la suite est trop longue et pathétique. Après mon récit tous m’ont dit « n’ka » ce qui veut dire courage !
La femme qui est montée au niveau de DJEREGOUE a pris la parole en ces termes. « Hum, ces aides soignants là sont des sorciers » ils ont tué mon mari l’année dernière. Il ne se sentait pas bien. C’est lui-même qui a pris sa moto et m’a remorqué. Quand on est arrivé, ils ont pris sa tension et sa température. Ils lui ont demandé de s’allonger. Il avait la fièvre surement un début de Palu. Un monsieur est rentré dans une blouse blanche. Il n’a même pas salué, de par sa démarche, tu sauras en même temps que c’est lui le maitre des lieux. Il a ordonné qu’on lui fasse un petit prélèvement de sang pour une analyse rapide. Il a appelé çà TDR (Test de Diagnostic Rapide). Il a rassuré mon mari que ça ne lui fera aucun mal. Et ceci devait permettre de voir rapidement s’il a le paludisme ou pas. Effectivement il avait le palu, le test s’est avéré positif par deux traits rouges. Ils ont décidé de le garder pour l’administrer du sérum antipaludique. Ils ont prescrit des médicaments que je suis allé payer à leur mini pharmacie. Ils m’ont dit d’aller apprêter quelques couvertures parce qu’on devait passer toute la nuit. L’homme en blouse blanche est partie puis a laissé les autres de s’occuper de mon mari. Je sentais dans leurs gestes des hésitations. Difficilement, ils ont trouvé la veine. Deux heures après, le premier sérum est fini. Mon mari dormait. Je ne savais pas aller à moto. J’ai pris un zem pour aller ramener à manger puis des couvertures. Je reviens plus tard avec mon fils. A l’entrée, un des aides soignant m’intercepte. Il m’annonce que le cas de mon mari s’est aggravé. D’attendre dehors, ils s’affèrent à l’intérieur. Qu’avait-il de nouveau ? Il ne m’a donné aucune réponse. Il suait abondement …J’ai su que quelque chose de plus grave s’est passé à mon absence. Mon mari a rendu l’âme. (Un grand silence … Puis des larmes).
Dans les indiscrétions j’ai appris que lorsque le premier serum est fini, ils ont enlevé l’aiguille de la seringue car sa main s’enflait. Au deuxième sérum devant les mêmes difficultés de trouver la veine, l’assassin d’aide soignant a placé l’aiguille de la séringue sur la verge de mon mari.
Chers lecteurs de l’œil du passager, si vous n’avez pas bien saisie cette partie du récit, alors je reprends. L’aide soignant a placé l’aiguille de la seringue sur les veines du pénis de mon mari. Je ne sais quelle formation ils reçoivent même ! Shuan… Des sorciers comme ça ; on sait qu’il y’a chômage mais ne va dans la médecine qui veut avait elle conclue en larmes. Après son récit si triste, personne n’a plus eu le courage de continuer. C’était la consternation totale. Un monsieur devant moi a lancé sans cesse des interjections « lahi lama ilala ». Moi, je suis descendu à Lama-tessi. La pauvre dame me regardait mais elle semblait absente. Elle venait de narrer son souvenir le plus amer à des inconnus. Oui, quelque fois ça soulage.
C’était l’œil du passager par ATCHAM Aposto.