Togo, Anfoin dans Lacs 4 : Quand une morgue privée, frauduleusement légalisée traumatise les populations

Tous les moyens lugubres ont été mobilisés par les promoteurs d’une morgue privée située à Afagnan, dans les Lacs. Roublardise, influence, corruption en monnaies sonnantes et trébuchantes, sous fond de conflit d’intérêt et sexuel. Les techniciens du ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique (MSHP), sous l’ancien ministre Professeur Moustafa Mijiyawa, n’ont vu que du feu. Puisque, certains prétendent avoir bien fait leur travail ou l’ont fait en parfaite intelligence avec les promoteurs de l’édifice incriminé, qui devient aujourd’hui, une sorte de patate chaude dans les mains de son successeur, Pr Tchin Darre.

Cette morgue flambant neuve est construite en pleine agglomération comme une maison d’habitation et jouxtant un grand complexe hôtelier au bord de l’unique route goudronnée qui traverse la commune en venant de la ville d’Aného pour Amégnran-Kondzi. Habitants et usagers de cette voie sont stupéfaits et effrayés de découvrir cet endroit lugubre très exposé de stockage frigorifique de cadavres. Qui a donc pu avoir cette idée saugrenue de construire une infrastructure relevant d’une intimité et de la discrétion ? Qui a délivré les documents autorisant l’implantation d’une morgue à cet endroit ? Et contre quelle rétribution, le ministre en charge, la préfecture et la mairie des Lacs 4 ont-ils pu avoir, afin de faire un tel coup à la population ? Autant de questions qui continuent de tarauder les esprits, quand l’on constate que juste en face de cet immeuble se développe une industrie de cercueils.

C’est à la recherche de ses réponses à ces interrogations que la Rédaction de votre journal se transportait, depuis plus de quatre mois, à plusieurs reprises sur le terrain, rencontrer les acteurs et écouter les populations.

Il est vrai que la mort est le prolongement de la vie. A ce titre, les représentations, symboles, croyances, mythes et les rituels que la mort suscite accompagnent le mortel tout au long de sa vie terrestre. Il faut donc prendre soin du mort. C’est certainement, au-delà de la recherche de la richesse, qui a poussé des investisseurs à se lancer dans la construction des morgues privées qui existent certes dans plusieurs pays. Aujourd’hui, au Togo, cet entreprenariat commence par prendre corps.

Seulement, l’implantation d’une morgue, ou chambre mortuaire, dans un établissement de santé, est soumise à l’article 29 du Code de la santé en République Togolaise. C’est d’ailleurs pourquoi, les promoteurs se sont adressés au ministère en charge de la Santé pour l’obtention d’un agrément en 2022. Naturellement, l’agrément doit être donné, doit fixer essentiellement les normes de construction, dont l’étanchéité des réservoirs des eaux usées, les spécifications logistiques et les ressources humaines. Sauf que, pour les emplacements d’implantation de morgues, la création ou l’extension d’une telle structure nécessite une autorisation du ministère de l’Environnement et du ministère de l’Urbanisme, voire les avis de la préfecture et de la commune, après des enquêtes et consultations de diverses instances. Et au Togo, la morgue est généralement implantée dans les arrières cours des hôpitaux.

Pour le cas de cette morgue privée d’Anfoin, la démarche n’a pas et inclusive. Ni la préfecture ni la mairie n’ont pas délivré d’autorisation d’implantation. Le préfet de la localité et tous les riverains étant pris à contre pieds car, le représentant du pouvoir central n’a été invité que pour l’inauguration de ladite morgue. Une invitation qu’il a simplement zappé. Toutes fois, le ministère de la Santé a estimé que son directeur préfectoral a participé à toutes les phases de l’infrastructure.

Selon les investigations sur place, c’est le Maire Kuevidjin Folly en personne qui a conduit l’implantation de cette morgue privée d’Anfoin. Mais, interpelé, celui-ci décline toute sa responsabilité et charge le ministère de l’Environnement qui a fait ses études d’impact environnemental et celui de la Santé qui a autorisé cette implantation. Le Maire Kuevidjin Folly dit n’avoir pas compétence pour donner son avis sur une telle implantation et donc il est libre dans sa conscience. Il ajoute que cette histoire a été clarifiée devant les chefs traditionnels en présence du promoteur de l’hôtel et la promotrice de cette morgue. Même le maire dit être sinistré car, ayant plusieurs lots de terrain dans les environs de cette morgue.

La supposée promotrice ou prête-nom est une Togolaise résidant au Gabon. Tout a été simulé comme si c’était la construction d’une maison d’habitation sans pose de première pierre. Et ce n’est qu’à la fin qu’ils ont posé les enseignes pour procéder à l’inauguration.

Rappelons que c’est le maire sortant Kuevidjin Folly, qui avait présidé à l’implantation de la première pierre de l’hôtel à proximité, le 1er avril 2021. Or de l’avis de la conscience publique, ça serait lui-même le parrain de l’érection de la morgue, dont les démarches auprès du ministère de la Santé et de l’hygiène publique ont été concluantes en 2022.

   

Les images ci-dessus illustrent la présence effective du maire Folly KUEVIDJIN en costume bleu-foncé et cravate orange à la Donald Trump aux côtés de celui qu’on peut appeler son ancien ami, le promoteur Togbe KANKOE MESSAN II, habillé en boubou blanc. Toutes les six invités VIP figurent sur cette photo de la 1ère pierre avec en arrière-plan l’image du méga projet du Complexe Hôtelier MEKA GROUP. Une suite hôtelière très révolutionnaire dans la préfecture des Lacs qui connait un désert en logement des hôtes de marque. Un projet de plusieurs milliards qui comporte à terme 102 chambres dont 6 suites des hôtes de marque, 50 chambres de luxe, des salles de conférence modernes, piscine, night-club, etc. S’il avait déjà signé le permis de construire de la morgue, pourquoi n’avait-il pas déconseillé le promoteur de l’hôtel ou du moins l’informer de la présence d’une morgue à côté de l’hôtel.

On comprend de fil en aiguille que l’escroquerie a consisté à présenter l’obtention de l’autorisation d’exploitation délivrée comme document légal pour imposer cette morgue aux populations alors que ni la mairie ni le ministère de la santé n’ont compétence à délivrer un tel permis de construire. Les enquêtes révèlent aussi que, non seulement l’argent avait beaucoup circulé pour mouiller le circuit, mais aussi le Ministre Moustafa Mijiyawa qui avait signé cette autorisation a reçu beaucoup de pressions venant de la cheffe du gouvernement démissionnaire. Cette dernière serait également dans l’actionnariat, pour l’implantation de trois autres morgues dans la localité.

Ce n’est un secret pour personne que Mme Victoire Tomégah-Dogbé chercherait à imiter Dame Ingrid Awadé qui a son actif plusieurs projets d’envergure. L’ex Premier ministre a déjà échoué dans la réalisation des « Hôpitaux Mères et Enfants », puis maintenant veut s’investir dans l’industrie capitaliste de la mort en voulant falsifier Docta Lafia.

C’est le lieu d’en appeler à la vigilance du ministère de la Santé et de l’hygiène publique pour la veille permanente et pourquoi pas une délocalisation de cette usine, dont les errements constatés par la presse ont déjà permis de rappeler l’exploitant de cette morgue privée à l’ordre.

A suivre

B. Douligna

« TAMPA EXPRESS » numéro 0083 du 29 août 2025

 

 

 

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